La presse internationale continue de s’inquiéter de la fuite en avant autoritaire en France


«Coup d’État», «affront à la démocratie», «République à l’agonie» : revue de presse


Les titres de la presse internationale sur le coup de force de Macron

C’est devenu habituel : en France, les médias sont tellement verrouillés qu’il faut regarder la presse internationale pour avoir de vraies informations sur la vie politique de notre pays.

En Angleterre

Prenons The Telegraph, grand journal anglais, l’un des titres de presse les plus anciens et les plus lus de Grande Bretagne. Sa ligne éditoriale est classée plutôt à droite en Angleterre. En France, elle serait traitée d’«ultra-gauche», à en juger par l’un de ses derniers articles.

Le 6 septembre, le journal titre : «Le coup d’État de Macron est un affront éhonté à la démocratie» et s’insurge de la nomination de Michel Barnier comme Premier Ministre, un choix «déconcertant et [qui] va à l’encontre des souhaits du peuple français» estime l’article. The Telegraph n’a pas oublié que Barnier a été l’artisan du Brexit en tant que technocrate européen.

Le journal explique à ses lecteurs : «Macron a décidé de maintenir son propre gouvernement, désormais illégitime, en place, créant une crise politique et une impasse institutionnelle sans précédent», puis souligne que «même le Financial Times, un journal qu’on ne peut pas accuser de tendances gauchistes, a suggéré qu’il serait préférable de jouer le jeu démocratique et de laisser la coalition de gauche arriver au pouvoir».

The Telegraph ne mâche pas ses mots, et écrit qu’«après avoir tenu la France en otage pendant 60 jours, Macron a finalement nommé» un chef de gouvernement venu d’un parti «arrivé en quatrième position lors des élections, avec moins de 10% des voix et seulement 46 sièges. Un choix absolument déroutant et antidémocratique». Avec ironie, le journal poursuit : «Macron l’a reconnu : il ne voulait pas que la gauche annule sa réforme des retraites, très impopulaire. La démocratie peut en effet être désagréable : il faut parfois négocier avec ses rivaux ou accepter que les citoyens veulent simplement que vous quittiez le pouvoir».

Enfin, l’article s’alarme du fait que «Marine Le Pen est devenue de facto l’arbitre de la nomination du nouveau Premier ministre français» et que le Nouveau Front populaire, coalition arrivée en tête, soit mise au ban.

En Espagne

Chez les espagnols, c’est le quotidien d’information El Independante qui décrit la situation de la France, dans un article paru juste avant la nomination de Michel Barnier : «La Ve République est à l’agonie et erre comme un zombie». Le journal estime que «le coup de grâce a été donné à Emmanuel Macron en approuvant par décret la réforme des retraites au printemps 2023. Cet été, il lui a offert une ultime agonie après un appel électoral express». Il considère que «le pouvoir du président, le plus important de toutes les démocraties occidentales, ne sert à rien dans une situation exceptionnelle telle que celle-ci». Ce qui nous rappelle au passage qu’aucun président n’a autant de pouvoir qu’en France, et que les 49.3 et autres coups de force relèvent de la science fiction dans les pays voisin.

Une analyse qui n’est pas nouvelle

Ce n’est pas la première fois que le pourrissement politique en France inquiète à l’étranger. En juillet, Mark Ruffalo, célèbre acteur hollywoodien connu notamment pour son rôle de Hulk dans la saga de films Marvel, partageait sur Twitter un article du journal anglais The Guardian qui s’alarmait de l’attitude de Macron. L’acteur publiait ce message : «Les centristes français doivent décider : soutenir la gauche – ou donner les clés du pouvoir à l’extrême droite ? Maintenant, nous allons voir si Macron tient vraiment à la démocratie française autant qu’il le dit». Il a maintenant la réponse.

Le journal allemand centriste Die Zeit, qui tire à 500.000 exemplaires par numéro, publiait pendant les Jeux Olympiques : «Même au milieu de la cérémonie d’ouverture des Jeux olympiques, Macron n’a pas pu s’empêcher un geste de triomphe politique», «il se comporte comme s’il avait remporté les élections haut la main».

Die Zeit s’interrogeait : «Mais qui commande la police dans les stades ? Qui donne d’innombrables interviews ? C’est l’ancien gouvernement. La faction qui a reçu le moins de voix au premier et au deuxième tour des élections législatives. […] Macron fait désormais fi de toutes les coutumes démocratiques, selon lesquelles le parti ayant le plus de députés gouverne toujours immédiatement». L’hebdomadaire ajoutait que la France est «politiquement décapitée».

De son côté, le New York Times, l’un des plus grands quotidiens des États-Unis et l’un des journaux les plus lus du monde, indiquait le 10 juillet : «Macron, dont le style de gouvernement a été très centralisé et descendant, au point qu’il a convoqué les élections sans consulter son propre Premier ministre» avait fait un choix qui «semblait contenir les germes d’une possible dérive et d’une confrontation dans la mesure où son interprétation du résultat des élections n’est en aucun cas partagée».

En décembre 2023, le grand journal anglais The Times titrait sur le «triomphe de Marine Le Pen sur Emmanuel Macron» et la «victoire idéologique de l’extrême droite» après le vote de la Loi Immigration. Le New York Times, encore lui, expliquait à ses lecteurs que «le dirigeant français a été élu à deux reprises avec la promesse de maintenir le populisme à distance. Mais son projet de loi a reçu un rare soutien de l’extrême droite, déclenchant une crise au sein de son parti».

Le grand quotidien espagnol, El País écrivait : «Il y aura désormais une photo de ses députés votant aux côtés de Le Pen», et pas «pour n’importe quelle loi», pour «celle qui concerne le sujet favori de l’extrême droite : l’immigration».

Le grand média allemand Die Zeit titrait à propos de Gérald Darmanin : «Aussi agressif que Le Pen», le décrivant comme l’architecte de l’escalade violente du gouvernement, et un ministre aussi à droite que Le Pen. Die Zeit écrivait : «Macron n’est apparemment pas gêné par le fait que Darmanin ressemble désormais de plus en plus au Rassemblement National». Le journal précisait : la police française utilise «des grenades, des balles en caoutchouc et des gaz», et que des gendarmes ont tiré sur des écologistes depuis des quads. Surréaliste vu d’Allemagne.

En 2021, Die Zeit qualifiait la France de Macron «d’Absurdistan autoritaire» à propos de la gestion délirante du Covid : «La gestion sanitaire de Macron est presque monarchique. Les décisions majeures concernant un confinement ou un couvre-feu sont prises dans un ‘conseil de défense’».

La même année, le journal allemand Handelsblatt, un quotidien «économique» de centre-droit, estimait que le gouvernement Macron avait choisi de régner à l’extrême droite, décrivait la radicalisation de la police et s’alarmait de la situation française : «L’Allemagne doit désormais s’inquiéter. […] Les Européens négligent l’orage qui menace la pointe ouest du continent : les extrémistes de droite sont plus près que jamais de prendre le pouvoir en France. […] La situation politique de la France ressemble plus à la République de Weimar finissante qu’à la France moderne que l’on connaissait. Macron aurait pu, dans ce chaos, être la voix de la Raison. Aujourd’hui, rien ne suggère qu’il souhaite l’être. Demain, il sera peut-être trop tard».


Le monde entier regarde la France comme un régime autoritaire et reste stupéfait des coups de force de Macron, qui valent largement ceux de Trump ou de Bolsonaro. Mais pendant ce temps, les médias français font comme si de rien n’était et que tout semble normal.

https://contre-attaque.net/2024/09/15/la-presse-internationale-continue-de-sinquieter-de-la-fuite-en-avant-autoritaire-en-france/

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