Le dossier : Libérons les terres !

En Une : « Libérons les terres » par Benoit Guillaume.

À l’heure même où ce clinquant numéro de CQFD sort des presses, les sinistres actionnaires du groupe Bolloré sortent de leur assemblée générale annuelle et des milliers de paysans sortent d’une série d’occupations de plantations en Afrique de l’Ouest. C’est que le fleuron entrepreneurial français possède plus de 100 000 hectares de plantations industrielles sur le continent. Rien qu’au Cameroun, 6 000 paysans ont vu 40 000 hectares de leurs terres accaparées par les appétits fonciers de Bolloré. Révoltes villageoises, blocages des plantations, et aujourd’hui occupations, jalonnent depuis deux ans un rude combat mené par ces paysans expropriés. Mais cette lutte n’est que la face émergée d’un phénomène qui s’est généralisé depuis la crise financière de 2008 : l’accaparement des terres agricoles des pays du Sud par des groupes financiers et certains pays (Qatar, Émirats arabes) à des fins spéculatives.

Plus discret et plus complexe, en France, l’accaparement des terres se manifeste sous de multiples visages. En 30 ans, les surfaces urbaines ont augmenté de plus de 40 %, avalant des kilomètres de terres agricoles pour toujours plus de zones pavillonnaires sordides et autres « zones d’activités ». Cette bétonisation généralisée est partie pour s’amplifier dans les années à venir. Dans leur projet de réforme territoriale, les socialistes ont voté l’an dernier la « loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles », dite loi Mapam. Il s’agit entre autres de créer par décret des métropoles de plus de 400 000 habitants, futurs porte-avions de la croissance. Nos campagnes ne seront plus à terme que des espaces récréatifs pour urbains en mal de nature ou des zones de production industrielle au service de villes-monstres.

« L’accaparement des terres est un nouveau visage du colonialisme » > Le journaliste italien Stefano Liberti a enquêté plus de deux ans sur l’accaparement des terres agricoles dans les pays du Sud. De l’Éthiopie à la Bourse de Chicago en passant par l’Arabie Saoudite, il a rencontré des investisseurs, des paysans et des fonctionnaires, tous acteurs ou victimes d’une ruée mondialisée vers les terres arables. Il revient ici sur son travail qui a donné lieu à un livre, Main basse sur la terre. Land grabbing et nouveau colonialisme, sorti en 2013 aux éditions Rue de l’Échiquier. Interview.

Entre le marteau de la métropole et l’enclume de l’agro-industrie : Politiques de terres volées > Depuis quelques années, le phénomène d’accaparement des terres a pris de l’ampleur, et avec lui ses conséquences désastreuses, notamment sur le continent africain et en Europe de l’Est. En France, on ne connaît pas pour l’instant d’investissements massifs visant les terres de la part des grandes entreprises multinationales. Pour autant, on peut bien parler de confiscation du foncier agricole, qui se développe de différentes manières, plus ou moins insidieuses. Petite typologie non exhaustive de ce qui prive les paysans et paysannes de leur outil de production. Analyse.

Une réforme agraire contre la concentration des terres ? : Le nerf de l’agraire > Reprendre la terre aux grands propriétaires pour la redistribuer aux sans-terre. Si l’idée même de réforme agraire est peu présente au sein du mouvement paysan, le collectif breton « École Paysanne 35 » tente de remettre la collectivisation des terres agricoles au centre des débats. Reportage.

Des ZAP pour zapper la spéculation > En France, des propriétaires terriens laissent en friche leurs parcelles à des fins spéculatives – alors que les terres agricoles se raréfient. Michel Apostolo, responsable de la commission foncière à la Confédération paysanne, a participé à une action de remise en culture de terres dans le Vaucluse. Rencontre.

« Renouer avec un imaginaire d’autonomie » > Clin d’œil à Reclaim the streets, mouvement anglais des années 1990, Reclaim the fields a mené des actions d’occupations face à divers projets d’aménagement. Retour avec une étoile de cette « constellation » sur cinq ans de luttes et de rencontres.

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