Fin de Windows 10 : ne jetez pas votre PC trop vite!

Numérique

Face aux critiques, Microsoft consent à prolonger d’un an le support pour Windows 10. Mais sous conditions. Le point sur les différentes solutions pour éviter de jeter les PC concernés.

Près de 47 000 signatures recueillies en quinze jours : lancée mi-septembre, la pétition « Non à la taxe Windows » n’est pas passée inaperçue. Dans le viseur de l’association Halte à l’obsolescence programmée (HOP), à l’origine du texte avec une vingtaine d’autres organismes, la fin programmée du support pour Windows 10, le système d’exploitation de Microsoft.

Elle menace de pousser au rebut 400 millions d’ordinateurs à travers le monde, selon le collectif : ces machines sont en état de marche, mais pas assez puissantes pour supporter la nouvelle version, Windows 11. Une forme d’obsolescence forcée. HOP dénonce une « aberration écologique », à contre-courant de la nécessité d’allonger la durée de vie de nos appareils : « 90 % de l’empreinte environnementale d’un ordinateur provient de sa fabrication », souligne Flavie Vonderscher, responsable plaidoyer de l’association. HOP prévoit ainsi de manifester devant le siège de l’entreprise, le 7 octobre, pour se faire entendre.

Cette mobilisation de la société civile, renforcée par ses nombreux échos médiatiques, a fait bouger Microsoft. Alors que le géant de l’informatique avait annoncé la fin des mises à jour pour le 14 octobre, il a entrouvert la porte à une prolongation. Quelles sont les options désormais possibles pour son ordinateur tournant sous Windows 10 ?

Que faire de son PC ?

La première serait de continuer à utiliser la machine sans mise à jour. Elle est à écarter : tous les spécialistes de l’informatique le déconseillent. Non pas pour céder à l’insistance de Microsoft et de ses messages pressants qui s’affichent depuis des mois sur l’écran des ordinateurs concernés. Mais en raison des réels risques pour l’utilisateur.

De nouvelles failles de sécurité apparaissent en permanence sur les systèmes d’exploitation. Faute de mise à jour pour les colmater, un ordinateur sous Windows 10 deviendra de plus en plus vulnérable au fil des mois. Et ce, même s’il continuera de fonctionner. « Le risque est qu’un hacker transforme votre ordinateur en botnet [réseau d’ordinateurs détournés à des fins d’attaques informatiques] ou qu’il vole vos données, par exemple pour usurper votre identité », commente Frédéric Bordage, cofondateur de l’association Green It, membre du collectif appelant Microsoft à revoir ses pratiques.

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La seconde option (mais la première à être réellement raisonnable) consiste donc à activer la prolongation du support. Sous pression, Microsoft a consenti à la proposer gratuitement jusqu’à octobre 2026. Cette possibilité nécessite de disposer d’un compte Microsoft et de s’inscrire au programme ESU (Extended Security Updates, ou mises à jour de sécurité étendues) : l’entreprise a prévu l’envoi de notifications à cet effet courant octobre. L’extension permet aux utilisateurs de « continuer à utiliser leur PC tout en planifiant leur transition », vante une porte-parole auprès de Reporterre.

Mais le recul de Microsoft est très partiel. Le sursis n’est que d’un an. Et il est proposé aux seuls particuliers. Pour les entreprises et les services publics, le problème reste entier. « Plusieurs collectivités nous indiquent devoir faire face à un coût de 500 000 à 1 million d’euros pour leur parc informatique », assure Flavie Vonderscher, de l’association HOP. Microsoft propose l’extension d’un an aux « organisations commerciales » pour un coût de 61 dollars par appareil (environ 52 euros) — cette catégorie inclut la plupart des organismes publics. Le montant est réduit à 1 dollar (0,85 euro), toujours par ordinateur, pour les écoles et les ONG.

Plus long terme

De fait, la pression de Microsoft pour pousser à l’adoption de Windows 11, et donc parfois au changement d’ordinateur, répond à son intérêt économique. « Techniquement, rien n’empêche de maintenir un logiciel pendant cinquante ans. Mais les prix de vente des logiciels, qui incluent le coût des mises à jour, sont tirés vers le bas. Les éditeurs sont poussés par leurs actionnaires à vendre de nouvelles licences, ou de nouveaux ordinateurs incluant ces licences », commente Frédéric Bordage.

Microsoft préfère vanter les atouts de Windows 11 : la nouvelle version permet de bénéficier de « protections avancées » face à des « menaces de cyberattaques de plus en plus sophistiquées », assure l’éditeur.

De nombreuses associations réclament une intervention législative. La coalition Right to Repair exhorte la Commission européenne à rendre obligatoires les mises à jour pendant quinze ans pour les ordinateurs portables — actuellement aucune durée spécifique n’existe pour ces appareils, autre que la garantie générale des produits d’une durée de deux ans.

Pour Windows 10, Microsoft entendait arrêter les mises à jour dix ans après le lancement, remontant à juillet 2015 : cette durée de support était un « engagement communiqué aux consommateurs avant le lancement de Windows 10, et qui reflète notre approche standard de gestion du cycle de vie des produits », explique une porte-parole.

Passer aux logiciels libres

La vraie-fausse fin du support de Windows 10 peut aussi être l’occasion de s’émanciper de la tutelle de Microsoft. Autrement dit, de passer aux logiciels libres. « Linux peut donner une seconde vie à un PC tournant sous Windows 10 », souligne Frédéric Bordage. Cette dernière option risque toutefois d’effrayer les utilisateurs peu technophiles. À tort ?

Le système d’exploitation est plus facile d’accès que par le passé. De nombreuses versions (appelées distributions) différentes de Linux existent. Parmi les plus souvent citées pour leur simplicité : Ubuntu, Mint et Zorin OS. « Installer Linux n’est pas plus compliqué que de faire passer un ordinateur saturé de Windows 10 à Windows 11 », avance Laurent Costy, vice-président de l’April, association de promotion du logiciel libre.

« Certaines distributions de Linux fonctionnent sur des PC vieux de vingt ans »

L’opération passe par la création d’une clé USB dite « bootable » pour installer Linux. Si la tâche n’est pas insurmontable, les béotiens peuvent trouver de l’aide auprès de la communauté des utilisateurs de logiciels libres : de nombreux groupes locaux organisent des « install party » (voir le calendrier ici). Au rang des atouts du logiciel libre, l’entraide s’ajoute à la gratuité…

Pour autant, adopter Linux ne se fait pas totalement sans frictions. Un temps d’adaptation est nécessaire pour (re)trouver ses habitudes dans les menus, les icônes… D’autant qu’en plus du système d’exploitation, il faut parfois aussi basculer sur des versions « libres » de ses logiciels favoris — comme la suite Libre Office en remplacement de Word, Excel et PowerPoint.

« Le site Framalibre recense des solutions qui couvrent 98 % des besoins, estime Laurent Costy. Ce n’est que si l’on a une utilisation avancée de certains logiciels spécifiques que les alternatives sont difficiles à trouver. » La difficulté peut aussi concerner les pilotes de certains périphériques (écrans, casques, etc.).

Linux ne permettra pas d’échapper à la nécessité de mettre à jour son ordinateur pour le protéger des failles de sécurité. « Et les systèmes d’exploitation open source ne sont pas, eux non plus, maintenus ad vitam æternam », signale Frédéric Bordage. Mais, une fois dans le monde du libre, il est toujours possible d’adopter une autre version de Linux. D’autant que certaines sont peu exigeantes en matière de performances de l’ordinateur, ajoute Frédéric Bordage : « Certaines distributions de Linux, très légères, fonctionnent sur des PC vieux de vingt ans. »

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