28 mars 2025 par Floréal
Je parcours les pages d’accueil de plusieurs sites libertaires créés par des organisations. Dans un réflexe quelque peu masochiste, je vais même dans la foulée jeter un œil – rapidement – aux sites des deux NPA.
Partout, rien, pas un mot, sur la condamnation de l’écrivain Boualem Sansal à cinq années de prison par ce qu’il est difficile d’appeler la justice algérienne, aux ordres de l’autocrate qui sert de président à ce pays.

Il fut un temps où le mouvement libertaire s’honorait de défendre la liberté d’expression, et pas seulement la sienne, souvent réprimée, mais aussi celle des écrivains, intellectuels, artistes, militants, non nécessairement proches des milieux anarchistes, que les Etats bâillonnaient, bafouant leur liberté de penser, de parler, d’écrire.
Mais depuis que l’extrême droite a le vent en poupe, d’un côté, et que de l’autre sévit la nouvelle idéologie indigéno-racialiste acoquinée à l’islamisme politique, il apparaît que la frilosité guide désormais les réactions d’une partie du monde militant là où, naguère, aucune hésitation n’était de mise, notamment dans la défense de ceux que les institutions voulaient faire taire.
L’extrême droite s’étant emparée du thème de la liberté d’expression, comme elle l’a fait avec la laïcité, on hésite ou on répugne désormais à défendre des individus ou certaines causes afin de ne pas paraître tenir un propos assimilable à celui de cette frange fascisante, dont il est pourtant facile de se démarquer. On sait parfaitement, en effet, que l’extrême droite se soucie comme d’une guigne de la liberté d’expression, comme d’ailleurs de la laïcité. Chacune de ces questions, abandonnées par la gauche, modérée comme radicale, n’est devenue pour elle un cheval de bataille que pour des raisons de vulgaire politicaillerie électoraliste et xénophobe. Et point n’est besoin d’attendre sa venue au pouvoir pour savoir ce qu’il en sera de son attitude dans ces deux domaines.
D’un autre côté, il est devenu évident qu’une certaine lâcheté s’empare d’une bonne partie du militantisme libertaire dès lors qu’il s’agit d’évoquer des événements impliquant des personnes et des pays du Maghreb ou du Proche-Orient. S’exprimer sur ces sujets doit pouvoir se passer de l’imprimatur du Sacré Collège « décolonial », sans craindre ni ses excommunications ni ses nervis et leurs amis gauchistes toujours prêts à voir en vous des complices du fascisme dès lors que vous ne partagez pas leurs délires.
Il est plus que temps de vous exprimer, chers camarades, et de vous souvenir des grandes voix libertaires qui surent se faire entendre dans la défense des bâillonnés et humiliés, comme l’est aujourd’hui Boualem Sansal. Car ce silence de mort qui est le vôtre, s’il perdure, rendra peu convaincants les prochains hommages que vous ne manquerez pas de rendre à Albert Camus ou à George Orwell.
Commentaires récents