Une étudiante déchire son diplôme d’ingénieure pour protester contre les ventes d’armes

Éducation, Guerre


Coup de théâtre le 13 décembre dernier, à l’Institut Supérieur d’Optique.


une étudiante déchire son diplôme d’ingénieure pour protester contre les ventes d'armes

Lors de la cérémonie de remise des diplômes, une étudiante a déchiré le document devant le public, en déclarant sur l’estrade :

«La recherche scientifique sert l’industrie de l’armement. La France vend des armes à des dictatures et des États qui commettent des génocides. On peut choisir de refuser ce diplôme. Vos salaires viennent de la mort. Organisons-nous contre les génocides en cours !»

Dans cette grande école située sur le campus de Paris Saclay, surnommé la «Silicon Valley française», des firmes d’armement financent et bénéficient des recherches qui leur servent à accroître leur business de mort. L’Institut d’optique a été créé en 1917 suite à la Première Guerre Mondiale, et n’a jamais cessé de collaborer avec l’industrie de l’armement. Les deux principaux employeurs des ingénieurs qui sortent de l’école sont Thalès et Safran, des grandes entreprises d’armement.

La courageuse étudiante a publié la vidéo de cette action sur YouTube accompagnée d’explications, qu’elle résume dans un texte publié sur un blog de Médiapart :

«D’une part, l’industrie de l’armement est insidieuse dans les écoles d’ingénieurs. Les partenariats sont cachés, et nombreux sont celles et ceux qui se retrouvent à faire de l’armement sans en être conscients. Dans le campus Paris-Saclay, notre « Silicon Valley française », les industries d’armes se retrouvent en face des établissements publiques et sont omniprésents dans la recherche. Les contrats des mécénats d’établissements publiques restent secrets. Quels sont les montants, les conditions et les contreparties ?

D’autre part, l’industrie de l’armement française n’œuvre pas que pour sa défense: la France est le deuxième pays exportateur d’armes du monde. Nos plus gros clients : Inde (29%), Qatar (17%), Égypte (6.4%). Ce sont trois états autoritaires, voire des dictatures. Les paroles critiques du gouvernement sont censurées et arrêtées de manière arbitraire. En Égypte, la torture est utilisée contre les opposants politiques.

Autre client : Israël. Cet État commet un génocide reconnu par les instances internationales. En 2023, La France lui a vendu 30 millions d’euros de matériel militaire et pour près de 20 millions d’euros de prises de commandes. C’est le CEA [Commissariat à l’énergie atomique] qui lui a permis de se doter de la bombe atomique. Les entreprises qui vendent à Israël sont : Airbus, le CEA, Dassault, KNDS, MBDA, Safran, Thalès, Damefo, PGM.

Autre client : la Russie. L’Observatoire des armements, le seul centre d’expertise et de documentation indépendant dans le domaine de la défense et de la sécurité en France, a fait un rapport complet sur « Comment la France détourne l’embargo sur la Russie. »

Pourquoi vend-on à ces pays? Ce n’est pas principalement pour des raisons économiques, puisque cela ne concerne que 1% du PIB. Mais pour des raisons impérialistes et colonialistes : les conflits en cours dans le monde nous permettent de continuer à exploiter les ressources humaines, minières et végétales. Les personnes qui inventent les armes en sont responsables.

Et on peut choisir de refuser ce diplôme.
Actuellement, il y a des génocides.
Actuellement on est toujours sur une dynamique de +3 degrés qui fait que la plupart des endroits qu’on connaît vont radicalement changer.
Actuellement, on a un état de plus en plus autoritaire qui passe des lois à coup de 49.3.

Actuellement, il y a des gens qui vont en prison, meurent, se font torturer car ils élèvent leur voix. Et vous pensez que je suis fière de ce diplôme ? Fière de quoi en fait ?»

En 2022, dans la grande école d’agronomie parisienne AgroParisTech, sous tutelle du ministère de l’agriculture et de l’enseignement supérieur, une action similaire avait eu lieu. Dans cette institution qui forme les futurs scientifiques chargés de faire fonctionner le capitalisme vert, de concevoir des OGM, pesticides, «compensations» et autres innovations pour l’agriculture productiviste, la cérémonie de remise de diplômes avait également été perturbée. Plusieurs étudiants et étudiantes avaient prononcé un discours anticapitaliste et appelé à déserter le métier confortable et destructeur qui leur était promis, rejetant ainsi avec panache une éventuelle carrière au sein de l’élite.

«Nous ne voyons pas les sciences et techniques comme neutres et apolitiques», «nous pensons que l’innovation technologique ou les start-ups ne sauveront rien d’autre que le capitalisme».


On ne peut que saluer ces gestes de désobéissance et de désertion, de la part de jeunes promis à une carrière confortable, mais qui refusent malgré tout de détruire le vivant ou d’enrichir les marchands d’armes, et préfèrent résister.

https://contre-attaque.net/2024/12/28/une-etudiante-dechire-son-diplome-dingenieure-pour-protester-contre-les-ventes-darmes/

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