Espagne, Valence : État et classe politique sont dangereux et superflus

Le désastre du 29 octobre dernier n’a rien de naturel – « Seul le peuple peut sauver le peuple »

mercredi 20 novembre 2024, par Les Indiens du Futur.

Pendant et après les inondations meurtrières en Espagne, ce sont surtout les habitants qui se sont aidés eux-mêmes.
Tandis que ce sont les autorités politiques qui sont en grande partie responsables de l’intensité des désastres, à ajouter à l’habituelle culpabilité du capitalisme et de ses lobbies.

La civilisation industrielle fait subir à de plus en plus de mondes des catastrophes de plus en plus destructrices. Les institutions en place sont incapables d’arrêter d’alimenter les désastres, incapables d’adapter la société (ça coûterait bien trop cher et entraverait la « Croissance »), et à terme incapables de « réparer » les inévitables dégâts (quand les désastres s’accumulent et se répètent, Etats et assurances sont dépassés).
Soutenir encore la civilisation industrielle et ses idéologies fondatrices, c’est être fondamentalement irrationnel et suicidaire. Libérons-nous de son emprise sur les plans idéologiques, matériels et politiques.

Miguel Amorós, « Décomposition absolue à des niveaux élevés »

 Miguel Amorós, « Décomposition absolue à des niveaux élevés »

[Nous avons reçu de Miguel Amorós les notes qu’il avait rédigées pour sa participation à l’émission Contratertulia diffusée par Ágora Sol Radio, le 5 novembre dernier, suite aux inondations catastrophiques de la région de Valence.]

Le désastre causé par les inondations provoquées par la « goutte froide » du 29 octobre dernier, en particulier dans la partie sud de l’aire métropolitaine de Valence, n’a rien de naturel. Dans la genèse et le développement de la plus grande catastrophe de la région, quatre causes non naturelles ont convergé, qui sont étroitement liées aux modes de vie, de travail et d’administration des affaires publiques en régime capitaliste. La première, d’origine industrielle, est le réchauffement climatique généré par l’émission de gaz à effet de serre par les usines, les systèmes de chauffage et les véhicules, provoquant des phénomènes météorologiques extrêmes tels que la DANA [depresion aislada en niveles alto : dépression isolée à des niveaux élevés]. La deuxième, de nature politique, est l’incompétence coupable des administrations de l’État et des Régions, dont la passivité et la négligence irresponsables pourraient être qualifiées au sens juridique d’homicides. La troisième, de nature économique et sociale, est la suburbanisation complète de la périphérie agricole de la ville de Valence, c’est-à-dire la conversion des municipalités de la Huerta [Horta en catalan] en une grande banlieue-dortoir et en une zone polygonale logistique, commerciale et industrielle. La quatrième, conséquence de la précédente, est la motorisation généralisée de la population suburbaine, forcée par la séparation nette que le développement forcené a établie entre les lieux de travail et les lieux de résidence.

Le réchauffement climatique, produit de la combustion colossale d’énergies fossiles par l’activité industrielle et la circulation, a été baptisé « changement climatique » par les dirigeants pour masquer sa nature économique. L’habillage écologique qui a mis en scène l’apparente opposition des élites à la hausse globale des températures a promu un capitalisme « vert », dont le principal effet est d’en avoir très peu sur les couronnes des métropoles. Celles-ci, façonnées par un urbanisme sauvage et la mise en place d’infrastructures routières en tenaille, rendent dérisoires les mesures de « décarbonation » les plus puériles (bornes de recharge électrique, aménagements paysagers, usage du vélo, etc.). Quelle « durabilité » peut-il y avoir dans ces espaces métropolitains essentiellement non durables ?

La racaille dirigeante et la classe politique en général ne sont pas absolument inaptes et ineptes dans tous les domaines ; bien au contraire, elles font montre d’une grande réactivité et d’une remarquable inventivité quand cela concerne leurs propres intérêts, lesquels sont bien loin des intérêts des personnes qu’elles administrent

(…)

« Seul le peuple peut sauver le peuple » est le slogan spontané qui s’est imposé dès le début de la tragédie. L’absence totale de réponse administrative a été heureusement compensée par la présence de milliers de volontaires venus de toute l’Espagne pour accomplir les tâches les plus urgentes : nettoyer la boue et les affaires souillées, renflouer les locaux, s’occuper des personnes âgées et des malades, distribuer de l’eau et de la nourriture… Des adolescents de la capitale, des enseignants, des voisins sinistrés, des cuisiniers, des pompiers, des médecins, des infirmières, des mécaniciens, des paysans ont improvisé des groupes de travail, des cantines, des pharmacies mobiles, des points de distribution, des logements et même un hôpital de campagne pour répondre aux urgences du moment. Quand l’État a failli, quand la racaille bureaucratique qui prend les mauvaises décisions se cherche des excuses, quand les fausses nouvelles inondent, à leur tour, les réseaux sociaux, la société civile émerge. De nombreux volontaires, sans autre motivation que la solidarité et l’empathie avec les victimes se sont mis à la tâche
Pendant les cinq premiers jours, les naufragés ont survécu sans autre aide que celle-là. Cela nous amène à penser qu’à partir du moment où les gens s’organisent et se libèrent des obstacles et ce d’autant plus dans des conditions moins extrêmes, l’État et la classe politique sont superflus. Personne n’en a vraiment besoin. L’horreur, l’inhumanité et la politique bidon vont de pair.

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