C‘est devenu un marronnier ces dernières années. Chaque trimestre ou chaque année, les journaux titrent sur un record de dividendes versés aux actionnaires dans le monde. L’année 2024 ne devrait pas faire exception, au regard des chiffres à l’échelle planétaire. En revanche, la baisse de la part des revenus du travail fait plus rarement la une. Pourtant, celle-ci est confirmée par l’OIT.
L’Organisation internationale du Travail (OIT) alerte sur l’aggravation des inégalités. Selon son rapport de septembre 2024 sur les Perspectives sociales et de l’emploi dans le monde, la part des revenus du travail a baissé de 0,6 point à l’échelle planétaire entre 2020 et 2022.
De quoi s’agit-il ? La part des revenus du travail mesure la proportion du revenu total d’une économie que les personnes gagnent en travaillant. Celle-ci est tombée à 52,3 % en 2022. Ces revenus s’additionnent aux revenus du capital pour former le revenu total d’une économie, rappelle l’OIT.
Vingt ans de baisse des revenus du travail
La pandémie de Covid-19 explique en partie la baisse observée entre 2020 et 2022, mais la diminution de la part des revenus du travail se poursuit depuis au moins 20 ans. En effet, depuis 2004, cette part a chuté de 1,6 point. Pour la seule année 2024, cela représente une perte de 2 400 milliards de dollars pour les travailleurs à l’échelle mondiale. La principale cause de cette baisse au cours des deux dernières décennies est l’évolution technologique, notamment l’automatisation. Si l’OIT note qu’elles ont « stimulé la productivité et la croissance économique », l’organisation précise que « les travailleurs n’ont pas bénéficié équitablement des gains qui en ont découlé ».
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Pour noircir encore le tableau, les inégalités ne se limitent pas à la répartition des revenus entre capital et travail. En plus d’une distribution inégale de cette répartition selon les zones géographiques, l’écart de revenu entre les femmes et les hommes reste immense et ne se réduit que très marginalement. En moyenne, dans le monde, lorsqu’un homme gagne 1 $, une femme ne gagne que 0,518 $. En 2005, une femme gagnait 0,47 $. À rythme constant, l’égalité ne serait atteinte qu’en 2221.
Je travaille, tu travailles, ils profitent
Si la part des revenus du travail baisse dans le monde, on ne peut pas en dire autant de celle du capital. Mardi 10 septembre, le cabinet Janus Henderson a annoncé qu’au second trimestre 2024, les grandes entreprises cotées ont distribué 606,1 milliards de dollars à leurs actionnaires. Soit 5,8 % de plus que l’année précédente, déjà marquée par un record – tout comme les années 2022 et 2021.
L’Europe est particulièrement bien placée du point de vue de la répartition mondiale des dividendes. Elle enregistre une progression de 7,7 %, grâce à des montants records en France, en Italie, en Suisse et en Espagne, explique le rapport. La France affiche à elle seule 58,6 milliards de dollars sur les 204,6 milliards absorbés par les actionnaires. Des chiffres qui devraient éclairer les débats sur le déficit budgétaire et le prochain projet de loi de finances en France, alors que tout indique que le gouvernement de Michel Barnier prépare une cure d’austérité.
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