Pendant toute la campagne européenne et à nouveau cette semaine dans Le Point, je suis caricaturée en pasionaria anti-vaccins, suppote des médecines parallèles, apôtre de théories complotistes.
Dans un dossier intitulé « Écologie : vérités et fariboles », paru dans l’édition du 13 juin, l’hebdomadaire Le Point avait l’ambition de dresser un « état des lieux en séparant les connaissances scientifiques de l’idéologie ». Une promesse évaporée dès les premiers mots, en opposant les « prophètes », incarnés par les collapsologues, aux « magiciens pro-croissance », les « catastrophistes » aux « rationalistes ». Tout est passé au peigne fin de la soi-disant science dénuée de toute idéologie du Point : les OGM, le nucléaire, le diesel, le réchauffement climatique, sans oublier le fameux glyphosate qui « intoxique les débats ». Comment comparer le lobbying-bulldozer des multinationales agroalimentaires ou de l’automobile aux groupes de pressions écologistes qui n’ont ni les moyens humains, ni les moyens financiers pour rivaliser ? Comment faire autant abstraction d’une notion essentielle et pourtant de plus en plus dévitalisée : l’intérêt général ? Ces donneurs de leçons ne parviennent qu’à creuser un peu plus le fossé entre deux perceptions de l’écologie, deux façons d’être au monde. Malgré son obsession pour la science et rien que la science, l’hebdomadaire n’a pas hésité à dégainer la verve religieuse pour dénoncer « la très sainte Église écologique de France », et à viser personnellement Michèle Rivasi, qualifiée d’adepte du « catéchisme antiprogrès » et « dont certaines positions semblent tenir plus du champignon hallucinogène que de la science ». L’eurodéputée EELV, récemment réélue, répond à ces attaques.Or toute ma vie je me suis battue pour les victimes, isolées, de scandales sanitaires et environnementaux et de mensonges d’État. Je me bats par exemple depuis des années pour la reconnaissance des électrohypersensibles, malades de la pollution électromagnétique, en tentant d’ouvrir une zone blanche refuge médicalisée dans les Hautes-Alpes.
Ce qui s’apparente a une campagne calomnieuse vise à disqualifier mon combat politique. Je m’interroge sur l’origine et l’objectif de telles attaques orchestrées.
Sont-elles téléguidées par les lobbies ? Pourquoi les journalistes et éditorialistes, dont la déontologie exige un recul critique et une neutralité, aboient-ils avec la meute ? Peut on encore émettre des doutes scientifiques en matière de santé publique ?
Faut-il reléguer le principe de précaution aux oubliettes pour le remplacer par le principe d’innovation, le secret des affaires, la fin de la protection des sources ? Je m’y refuse.
Ma réponse vise à rétablir la vérité et à rassurer celles et ceux qui ont pu être troublés par de telles allégations. J’écris pour terrasser l’hydre de la rumeur et du soupçon. Que les choses soient claires : concernant les vaccins, je ne remets pas en cause l’utilité de la vaccination, et je sais ce que les vaccins ont apporté en termes de progrès sanitaires au XXe siècle, de lutte contre la mortalité infantile…
La santé publique et l’intérêt général sont mes seules boussoles.
Scientifique de formation, diplômée de l’École normale supérieure et agrégée en biologie, fondatrice du premier laboratoire indépendant sur la radioactivité en France (la Criirad), je rejette depuis toujours l’obscurantisme. J’avance sous le double drapeau de l’intérêt général et de la santé publique. Amiante, Levothyrox, radioactivité, prothèses mammaires…, je me suis battue toute ma vie pour faire respecter la santé des gens contre les mensonges des lobbies.
Déjà en 1986, lorsque constatant le mensonge d’Etat face au nuage radioactif suite à la catastrophe de Tchernobyl j’ai créé un laboratoire indépendant pour mesurer la radioactivité, des menaces, des dénigrements de cette recherche indépendante ont plu. J’avais fait l’objet d’une exécution en règle. Trente ans plus tard, la Criirad réalise des études sur la radioactivité dans le monde entier et sert de modèle pour d’autres pays et structures de vigie citoyenne souhaitant se doter d’outils d’analyse indépendante.
Mon combat depuis toujours a été pour la transparence, l’information des citoyens et la reconnaissance des victimes de scandales sanitaires face au déni des autorités publiques.
Transparence toujours : sur le glyphosate nous avons obtenu une belle victoire au niveau de la Cour de justice de l’UE qui oblige l’Efsa à rendre publiques l’ensemble des études gardées confidentielles au nom de l’intérêt commercial et du secret des affaires.
Combattre les « liaisons dangereuses » qui gangrènent l’intérêt général et mettent en péril la santé publique, entre le monde de la recherche, de l’expertise scientifique et celui de l’industrie et de l’argent est pour moi un impératif catégorique.
Mon combat est un combat contre les lobbies.
Je l’affirme donc haut et fort : je me battrai toujours pour la protection de la santé et le fait de vivre dans un environnement sain. Par exemple, nous avons réussi à obtenir la transparence et la traçabilité sur les aliments, mais c’est toujours impossible avec les produits de santé. On nous oppose le secret des affaires. Alors que la défiance de nos concitoyens envers les médicaments et les vaccins (suite aux divers scandales sanitaires et à la multiplication des conflits d’intérêts) s’accentue, il me semble pourtant que débattre de la politique des produits de santé et de la politique vaccinale en France est nécessaire pour restaurer la confiance et protéger nos concitoyens.
Il ne faudrait pas qu’au pays de Pasteur la vaccination devienne une religion avec ses dérives fondamentalistes et une inquisition menée contre ceux qui, comme moi, exigent des études et de la transparence pour une juste évaluation de la balance bénéfices-risques.
Pour éviter la manipulation de la science, il faut mettre fin aux conflits d’intérêts et aux portes tournantes entre les élus et les dirigeants et experts d’agences sanitaires et les laboratoires pharmaceutiques.
Chacun doit comprendre que l’opacité crée le doute.
Chacun doit se convaincre que qui veut rétablir la confiance demande la clarté.
Nul ne pourra désormais prétendre ignorer ma position : mon combat, ce sont les lobbies et leur capture scientifique et réglementaire.
Je continuerai tout au long de mon nouveau mandat à mener la bataille pour l’intérêt général, contre les lobbies industriels qui nous intoxiquent et nous empoisonnent et qui manipulent la science.
Michèle Rivasi est députée européenne EELV, agrégée en biologie et diplômée de l’École normale supérieure
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