Philosophe brésilien, Sylvio Gallo enseigne la philosophie de l’éducation à l’Université de Campinas. Il explique dans ce texte concis mais riche que l’anarchisme s’est construit par la négation de toute autorité et par l’affirmation de la liberté. Considérer l’anarchisme comme une doctrine politique s’est nier sa force propre, l’affirmation de la liberté, la négation radicale de la domination et de l’exploitation.
C’est plutôt un principe moteur formé de quatre principes fondamentaux de théorie et d’action :
L’autonomie individuelle : l’individu est la base de tout groupe, il n’existe qu’appartenant à un groupe social de même que la société n’existe qu’en tant que groupement d’individus qui, en la constituant, ne perdent pas leur statut d’individus autonomes.
L’autogestion sociale : l’anarchisme est opposé à tout pouvoir institutionnel, à la démocratie représentative. Il propose une démocratie participative.
L’internationalisme : la constitution des États-nations européens est l’expression d’un processus de domination et d’exploitation, une entreprise politique liée à l’ascension et à la consolidation du capitalisme. La lutte politique ne se conçoit donc que comme une révolution mondiale.
L’action directe : la tactique anarchiste se traduit par des activités de propagande et d’éducation destinées à éveiller la conscience des contradictions sociales.
Il existerait donc un anarchisme unique, paradigme d’analyse politico-sociale, qui accepterait différentes formes d’interprétations de la réalité et d’action.
Les anarchistes reconnaissent le caractère politique de l’éducation et accusent son caractère idéologique puisqu’elle tend à reproduire la structure de la société d’exploitation et de domination. La proposition anarchiste s’articule autour de deux principes : l’éducation doit s’accomplir dans la liberté et préparer à la liberté.
Une éducation anarchiste doit partir de l’autorité, non comme un absolu infranchissable, mais pour la dépasser. Le processus pédagogique de construction collective de la liberté est un processus de déconstruction de l’autorité.
Sylvio Gallo affirme que dans la perspective anarchiste, l’unique éducation révolutionnaire possible s’établit hors du giron de l’État, étrangère aux systèmes publics d’enseignement.
L’objectif d’une école anarchiste aujourd’hui est de tester l’élasticité de la société capitaliste, en la mettant sous tension permanente, en cherchant les ponts de rupture.
Le développement technologique nous a conduit vers une société informatique appuyée sur les propriétaires des moyens d’information qui débouchera soit à l’événement d’un totalitarisme absolu basé sur le contrôle des flux, soit à la réalisation de l’antique utopie de la démocratie directe. Penser la philosophie de l’éducation dans le cadre du paradigme anarchiste pourra permettre la construction d’un projet éducatif voué à l’autogestion et à la démocratie véritable, rendue possible par un réseau de communication planétaire capable de dynamiter les frontières entre États-nations, conclut-il.
C’est actuellement, à notre connaissance tout du moins, le seul texte de Sylvio Gallo disponible en français. Au vue de la densité, de la pertinence, de la clarté et de l’intérêt de ces quelques pages, nous sommes curieux et impatient d’en découvrir d’autres.
ANARCHISME ET PHILOSOPHIE DE L’ÉDUCATION
Sylvio Gallo
Traduit du portugais par Irène Pereira
Précédé de « ÉVOLUTION ET RÉVOLUTION » de Élisée Reclus
114 pages – 7 euros
Éditions Le Passager clandestin – Paris – juin 2008
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