Ylies 6 ans, traité comme un terroriste

Par : Ccif | 3/02/15

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Crédit photo: Shutterstock

Dans cette affaire pour le moins emblématique, Ylies 6 ans, de confession musulmane, est malmené de manière odieuse par son école. Les autorités s’en prennent à sa mère, et tentent de les faire taire tous les deux.

Pour mieux comprendre les rouages infernaux de l’islamophobie ambiante dans lesquels ont été pris ce garçonnet et sa mère, revenons sur le contexte et le déroulé chronologique des faits.

Contexte: La maman est convertie à l’islam, mariée à une personne d’origine maghrébine. Son nom de famille ainsi que le prénom de son fils sont donc identifiables comme étant « musulmans ». Dans cette petite ville de l’Eure, où les personnes de confession musulmane sont peu nombreuses, elle a bien senti le regard et l’attitude des gens changer dès lors qu’elle a décidé de porter le foulard.

Chronologie des faits:

15 janvier, 9h20 du matin. La mère reçoit un appel du directeur de l’école, qui lui pose une série de questions étranges et surtout inappropriées. « Est-ce que vous avez des revendications contre mon école? », « avez-vous de la colère ou de l’agressivité à mon égard ou à l’égard de l’école? », question qu’il posera à trois reprises. Prenant soin de ne jamais mentionner les attentats, le directeur lui demande quel est son « ressenti ». Puis, il lui demande carrément s’il doit faire un signalement auprès de l’inspection académique concernant son fils et elle-même.

Choquée et abasourdie par cette conversation téléphonique, la maman se rend alors au commissariat pour rapporter les propos inquiétants tenus par le directeur de l’école de son fils. Elle est auditionnée et lesdits propos sont recueillis par les gendarmes.

Dès lors, le comportement du corps enseignant et du directeur change, pour devenir extrêmement hostile et agressif à son égard. Une succession d’événements surviennent.

20-22 janvier: Le petit garçon de 6 ans rapporte à sa maman qu’il a été puni plusieurs fois et que le directeur l’a saisi par le bras (au niveau du poignet) de manière violente et agressive. La maman emmène le petit chez le médecin qui délivre une interruption scolaire de deux jours. Ylies ne veut plus aller à l’école et montre des signes d’angoisse importants, comme l’apparition d’un eczéma.

23 janvier: La maman dépose plainte au commissariat pour violences à l’encontre de son enfant.

27 janvier: Elle reçoit, dans le cahier de correspondance de Ylies, un courrier étrange de l’inspection académique qui signale que le garçonnet se jette par terre et se cogne, volontairement, la tête contre les murs… Etrange en effet que ce courrier survienne à peine 4 jours après le dépôt de plainte de la mère qui signalait justement des violences physiques à l’encontre de son enfant.

Dans la foulée, elle apprend une chose ahurissante. L’école de son fils a organisé un « spectacle » avec les petits de CP, qui consistait à reproduire l’attaque contre Charlie Hebdo. Et le directeur a désigné son fils de 6 ans pour jouer le rôle d’un des tueurs…

La mère comprend alors avec horreur que son enfant est devenu l’élément exécutoire de l’école suite aux attentats, à tel point qu’on se sert de lui pour représenter les tueurs.

Elle diffuse son histoire sur Internet, les réseaux sociaux relaient l’information. Les langues se délient. Les enfants commencent à raconter à leurs parents que le directeur se montre parfois agressif à l’encontre du petit garçon, qu’il l’a bien désigné d’office pour jouer le rôle d’un des frères Kouachi et l’a tiré par le bras. Dans le même temps, le directeur cherche des éléments à charge de la maman, en appelant directement les parents d’élèves pour les questionner sur cette dernière.

Le CCIF, saisit par la mère d’Ylies, a en sa possession le procès-verbal de plainte et les différents échanges avec les autorités, ainsi que des témoignages de parents d’élèves. Éléments qui illustrent le comportement violent et abusif du directeur de l’école à l’encontre du garçonnet, et qui illustrent également le comportement des autorités après que la maman les ait alertées.

En effet, le 23 janvier, elle reçoit une convocation de la mairie de sa commune, qui l’invite à venir se présenter pour une « conciliation », en présence de la mairesse, du directeur de l’école, du corps enseignant, de l’inspection d’académie et de la brigade de gendarmerie. Demandant des explications sur le motif de cette convocation auprès de la mairesse elle-même, celle-ci lui répond qu’elle doit venir car elle est « mise en cause »! Quand la maman avertit qu’elle viendra accompagnée d’un avocat, on lui refuse catégoriquement, la mairesse lui disant que dans ce cas, « ce n’est même pas la peine de venir, madame ».

De victime, la maman est devenue coupable. De la même manière que dans l’affaire de Ahmed 8 ans, dès lors que les victimes d’islamophobie commencent à parler et à dénoncer des dysfonctionnements de la part des services publics (ici, l’école), la machine se met en marche pour tenter de les faire taire et d’étouffer l’affaire. Le système asservit leurs pensées, puis leurs droits, en se basant sur le principe de la menace : on s’en prend à ton enfant, puis à toi, tout en laissant planer une menace sur ta famille, ton honneur, ta réputation.

Mais pour tout mensonge d’un élu, d’un ministre, ou d’un représentant de l’Etat, le CCIF rétablira une vérité. Le gouvernement s’est engagé, à plusieurs reprises, à ne pas faire d’amalgame ni de stigmatisation. François Hollande a officiellement appelé à lutter contre l’islamophobie. Alors au-delà de vaines paroles, nous exigeons des actes fermes et exemplaires pour lutter contre cette violence physique et symbolique qui s’abat sur les citoyens de confession musulmane, dès leur plus jeune âge. Le directeur de l’école va t-il être auditionné aussi vite que le petit Ahmed de Nice, le petit Ayman de Villers-Cotteret ou la petite de 10 ans à Valbonne ?

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