Amériques, Extrême droite, Gouvernement
Tout va très vite, on fait le point
Quelques heures seulement après sa prise de pouvoir, Donald Trump a déjà lancé un tapis de bombes. Il met en œuvre sa politique à marche forcée. Dans notre camp, nous sommes tellement habitués à ce que les présidents « de gauche » trahissent leurs mandats que ça choque. L’extrême droite, quand elle arrive au pouvoir, applique ses promesses. Et vite.
Le nouveau président a prononcé une phrase qui nous rappelle les monarchies de droit divin : «Je crois que ma vie a été sauvée pour une raison. J’ai été sauvé par Dieu pour rendre à l’Amérique sa grandeur». La mission trumpiste est donc une croisade divine.
Puis il s’est mis en scène dans une grande salle de concert remplie de fans pour signer des décrets sous les acclamations. Difficile d’illustrer plus clairement la société du spectacle, désormais poussée à son paroxysme. Assis à un bureau installé sur une scène, il a signé les documents avant de les brandir devant l’assistance en délire et de jeter dans la foule son crayon comme une rockstar.
Les décrets
Parmi les premiers décrets, la sortie des États-Unis de l’Organisation mondiale de la santé, ce qui implique aussi l’arrêt du financement de cette institution mondiale qui lutte contre les épidémies, qui a quasiment éradiqué la variole ou le paludisme, et met en place des mesures pour endiguer le SIDA ou mène des interventions humanitaires, entre autres.
Autre décret, la levée des sanctions contre les colons israéliens qui commettent des crimes en Cisjordanie, violant le droit international. Le ministre israélien Bezalel Smotrich, a salué le «soutien inébranlable» de Donald Trump. C’est une carte blanche pour le vol des terres palestiniennes. Une priorité pour le nouveau dirigeant.
Trump a aussi gracié plus de 1.500 participants à l’assaut du Capitole en 2021, qu’il qualifie « d’otages ». Dans le pays de l’incarcération de masse et du tout répressif, un président d’extrême droite libère des centaines d’émeutiers. Ça passe, puisqu’ils sont fascistes.
Le nouveau président annonce aussi qu’il va «identifier et révoquer plus d’un millier de personnes» au sein de l’administration : une grande épuration. Il a aussi décidé de réinscrire Cuba sur la liste des États « soutenant le terrorisme ».
Par ailleurs, ce mercredi matin, le site du gouvernement Reproductiverights.gov, dédié aux droits en matière de sexualité et de procréation, n’est plus accessible. Il dispensait notamment des informations sur la contraception. De même, la version en espagnol du site Internet officiel de la Maison Blanche a disparu et affiche « 404 page not found ». Une mesure symbolique dans un pays avec une forte minorité hispanophone.
D’autres décrets suivront dans les prochains jours, avec par exemple l’exclusion des personnes transgenres de l’armée et du sport féminin, l’état d’urgence à la frontière avec le Mexique et l’envoi de l’armée, la fin du droit du sol, un grand programme d’expulsion d’immigrés, la relance de l’extraction des énergies fossiles…
Par ailleurs, après son bras tendu en plein meeting, Elon Musk a ironisé sur son réseau social : «L’attaque “tout le monde est Hitler” est tellement dépassée». Il ne nie pas, il en rigole. Critiquer son salut serait « ringard ». C’est donc une manœuvre délibérée : après avoir fait un salut choquant le monde entier, il relativise en entretenant le doute. Ainsi, plus rien ne pourra être considéré comme étant un symbole fasciste, même les choses les plus évidentes.
À ce rythme, bientôt, même brandir une croix gammée risque d’être normalisé, au prétexte que «oh, vous avec l’esprit mal placé, vous voyez vraiment des nazis partout, c’est un symbole hindou».
Les Ministres
En même temps, le nouveau gouvernement se précise :
- À la santé : Robert F. Kennedy junior. Celui-ci avait déclaré très sérieusement que «le Covid-19 affecte certaines races de manière disproportionnée. Il nuit davantage aux Blancs et aux Noirs. Les plus immunisés sont les Ashkénazes et les Chinois» ou encore que «Anne Frank jouissait de plus de liberté que les personnes non vaccinées».
Le nouveau responsable de la santé États-unien a aussi estimé que le SIDA «n’est pas causé par un virus. Ces gens meurent à cause du poppers… c’étaient des gens qui avaient un mode de vie gay» ou encore «ce n’est pas une maladie virale, mais c’est une maladie environnementale». Étonnant que ce complotiste fou furieux ait échappé au processus de sélection naturelle.
Opposé à la vaccination, Kennedy a invité le Professeur Perronne, médecin français pro-Raoult et proche des réseaux d’extrême droite, à Washington pour le dîner «Make America Healthy Again». Avec un tel ministre, pas étonnant que les USA sortent de l’OMS. - Secrétaire à la Défense : Pete Hegseth, qui estime que «le sionisme représente la civilisation occidentale et défend la liberté dans le monde». C’est un ancien militaire de la garde nationale, vétéran des guerres en Irak et en Afghanistan. Il est devenu célèbre en tant que présentateur de la chaîne Fox News, équivalent de Cnews.
Hegseth veut combattre les pratiques qu’il qualifie de «woke» au sein de l’armée, en particulier les personnes trans. Il est accusé de violences sexuelles par une militante Républicaine, il est connu pour son alcoolisme et totalement inexpérimenté pour un poste aussi stratégique. - Secrétaire à l’énergie : Chris Wrightigure, patron du secteur pétrolier et climatosceptique notoire. Il dirige la société pétrolière Liberty EnergChris et compte bien accélérer la production de pétrole et de gaz, ainsi que couper les prêts et subventions aux énergies renouvelables.
- Secrétaire du Commerce : Howard Lutnick, grand capitaliste, figure de Wall Street, PDG de la société financière Cantor Fitzgerald.
- À l’éducation : Linda McMahon. À la base, Trump envisageait de supprimer purement et simplement ce ministère. Finalement, il nomme cette dame qui a fait fortune en dirigeant une entreprise de spectacle de catch. Elle n’a aucune expérience éducative en-dehors de sa participation au lobby America First Policy Institute, qui veut un enseignement «célébrant l’Amérique».
Trump veut aussi faire le ménage dans les facs, qui se politisent sur la question palestinienne : «Dès ma première semaine de retour dans le Bureau ovale, mon administration informera tous les présidents d’université que, s’ils ne mettent pas fin à la propagande antisémite, ils perdront leur accréditation et le soutien des contribuables fédéraux…» - Directeur du FBI : Kash Patel, un individu inquiétant qui a publié une liste d’ennemis à poursuivre car membres, selon lui, de l’«État profond».
- Directrice du Renseignement : Tulsi Gabbard, vétérane d’Irak, qui reprend régulièrement la propagande russe et qui a rencontré en 2017 le président syrien, Bachar Al-Assad. Une agent du Kremlin à la tête des services secrets US.
- Immigration : Tom Homan, surnommé «le tsar de la frontière» ou encore la «brute épaisse» par ses détracteurs. Son objectif ? Expulser les 11 millions de personnes sans-papiers aux USA. Trump a été séduit, dit-il, par la «méchanceté» du personnage.
En 2018, c’est lui qui avait décidé de séparer les familles qui tentaient de passer la frontière. Entre 3.000 et 5.000 enfants avaient été arrachés à leurs parents et placés en rétention. À ceux qui accusent Tom Homan de cruauté et de racisme, il répond : «Dites ce que vous voulez, j’en ai rien à foutre !» - Directeur du bureau de la gestion et du budget : Russell Vought, qui a élaboré un document nommé «Projet 2025», un programme autoritaire qui propose la mise en place d’une quasi-dictature aux USA, centralisée autour du président, et abolissant l’indépendance de la justice. Un projet tellement inquiétant que Trump avait dû s’en démarquer pendant la campagne.
- Conseiller à la sécurité nationale : Michael Waltz, un ancien militaire des forces spéciales, membre des commissions des forces armées, du renseignement et des affaires étrangères. Il est réputé pour ses positions bellicistes en matière de politique étrangère. Il va réclamer aux membres de l’OTAN d’augmenter leurs dépenses militaires. Il cherche la confrontation avec la Chine et l’Iran.
- Ambassadrice auprès des Nations unies : Elise Stefanik, sioniste féroce et critique de l’ONU, qu’elle qualifie de «corrompue, défunte et paralysée» et même d’antisémite. Elle prône une «réévaluation complète du financement américain des Nations unies».
- Elon Musk : qu’on ne présente plus. Il va bénéficier d’un ministère sur mesure, celui de «l’efficacité gouvernementale». Musk qui se dit pour la «liberté d’expression», mais seulement celle de l’extrême droite, puisqu’il censure tous les gens qui le critiquent. Il a boosté comme jamais aucun média ne l’avait fait depuis la seconde guerre mondiale les contenus négationnistes, révisionnistes et racistes, y compris nazis. Il veut supprimer les aides d’État sauf pour ses propres entreprises. Il est placé à ce poste pour appliquer dans l’administration US la même politique qu’après son rachat de Twitter : 80% de licenciements.
L’avenir s’annonce radieux.
https://contre-attaque.net/2025/01/21/trump-jour-1-rafale-de-decrets-et-ministres-de-combat/
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