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Les riches font la guerre aux pauvres ET à la planète
Ces derniers jours nous avons eu trois exemples flagrants de cette guerre menée par la classe bourgeoise contre les pauvres et la planète qu’il est intéressant de mettre en parallèle : les feux très médiatisés à Los Angeles, ceux totalement ignorés en Afrique, et le rapport d’Oxfam sur les 1% les plus riches qui auraient déjà utilisé leur budget carbone – le quota d’émissions de CO2 acceptable par personne sur un an – en 10 jour seulement. En effet, les trois sujets sont liés par le capitalisme, même si aucun média dominant ne se risquerait à le mettre en avant.
Des feux historiques à Los Angeles, une catastrophe climatique et politique
À l’heure actuelle, on dénombre 24 mort-es dans les feux touchant Los Angeles. 105.000 personnes ont dû être évacuées. Il ne s’agit pas d’une catastrophe naturelle, mais d’une catastrophe politique. Parce que ces incendies sont sans précédent au cœur de l’hiver, et sont alimentés par la crise climatique.
60 alertes incendie ont été recensées entre le 1er et le 9 janvier, c’est 40 fois plus que les 12 années précédentes selon le World Resources Institute. Le réchauffement climatique a intensifié la sécheresse, la violence des vents et la hausse des températures. Or, qui est responsable du désastre climatique ? Les plus riches. Et qui sont les premiers impactés ? Les plus pauvres, bien que les incendies de villas luxueuses de célébrités polluent l’actualité.
La gestion de ces feux révèle de façon flagrante la fracture sociale du pays. En effet, aux États-Unis les ultra riches peuvent se payer un service de pompiers privés pour sauver leur maison : 45% des pompiers travaillent pour des entreprises privées. Ainsi les plus fortunés peuvent débourser 2.000 euros de l’heure (une estimation du Daily Mail) pour sauver leurs palaces, pendant que les autres voient leurs maisons brûler sous leurs yeux, ou meurent dans les flammes.
Le multimillionnaire Keith Wasserman a posté sur X un appel qui a fait scandale, à tel point qu’il a fini par l’enlever : “Quelqu’un a-t-il accès à des pompiers privés pour protéger notre maison ? Il faut agir vite. Toutes les maisons des voisins brûlent. Je paierai n’importe quel montant ». Le séparatisme des riches en un tweet : plutôt sauver des maisons que sauver des vies. Le revers de la médaille est que ces pompiers privés utilisent les mêmes bouches à incendie que les autres, et certaines ont de ce fait une moindre pression, voire se retrouvent à sec. Un accaparement de l’eau criminel propre au capitalisme le plus mortifère.
“J’ai de l’argent, alors pourquoi je me priverais” défendait un habitant des beaux quartiers. Cela se passe de commentaire, les possédants ne parlent qu’un langage : celui de l’argent. Les médias de leur côté préfèrent mettre en scène une Laeticia Hallyday effondrée par la destruction de sa maison : “Nous avons tout perdu, j’ai perdu une partie de mon âme” s’exclame-t-elle. Elle oublie de préciser qu’elle possède entre autres une villa à Saint-Barthélemy et des millions d’euros sur son compte en banque. Les médias ont plus d’empathie devant la maison détruite d’une personne richissime que devant des enfants palestiniens brûlés vifs.
Autre exemple de la manière dont la lutte des classes s’illustre dans les feux de Los Angeles : parmi les pompiers mobilisés, près de 1.000 sont des prisonniers qui peuvent ainsi voir leur peine réduite. Pour risquer leur vie, ils touchent entre 5 et 10 dollars par jour, et ont 4 fois plus de chance d’être blessés que les pompiers professionnels. De l’esclavage moderne en somme. On envoie les pauvres éteindre le feu allumé par les ultra riches.
Incendies à Madagascar : qui s’en soucie ?
On parle énormément des flammes qui ont touché Hollywood, mais quasiment pas de celles qui consument l’Afrique. Lorsque l’on regarde les images satellite des feux de forêt en cours cet hiver, l’Afrique tropicale et Madagascar apparaissent en rouge écarlate.
Sur l’île de Madagascar, située dans l’Océan Indien, des centaines de milliers de points représentent les feux qui sévissent actuellement du nord au sud du territoire.
Des dizaines d’hectares de forêt ont été calcinés depuis le 27 décembre, notamment dans un parc naturel protégé. Mercredi 8 janvier a été déclaré «jour mort» par la mairie de la commune de Ranomafana : tous les employé-es de la ville, du privé comme du public, devaient quitter leurs fonctions pour aller éteindre les incendies dans le Madagascar National Parks. Car il n’y a quasiment aucun moyen pour éteindre l’incendie : «Le feu se propage sous les couches de feuilles, sous le sol, c’est la raison pour laquelle, c’est difficile de lutter». Les habitant-es tentent de contenir les flammes avec des bêches : «Nous avons creusé dans la terre pour la jeter ensuite sur les flammes». Au risque de se brûler.
Les responsables du parc pensent que les incendies sont d’origine criminelle, déclenchés «en représailles aux sanctions prises contre les auteurs de coupes de bois illicites». Donc causés par l’appétit de capitalistes prédateurs. Et ils sont encouragés par une pluviométrie étonnamment faible en cette saison des pluies.
Des inégalités criantes
Rappelons que les riches sont directement responsables de l’enfer climatique vers lequel nous nous dirigeons, par leur mode de vie mais surtout par leurs investissements massifs dans les entreprises émettrices de CO2. Dans les médias mainstream, les chroniqueurs et autres journalistes de salon omettent systématiquement ce détail. À aucun moment le lien n’est fait entre réchauffement climatique et responsabilité des ultra riches.
Pourtant, la même semaine, Oxfam publiait un nouveau rapport illustrant le fait que les plus aisés ne sont pas uniquement des parasites vivant du vol de la richesses produite par les travailleurs et travailleuses – le 6 janvier à 16h49, les PDG du CAC 40 avaient déjà gagné le salaire moyen annuel d’un-e de leurs salarié-es. Ils sont également des criminels climatiques qui saccagent la planète et nous condamnent.
Dans ce rapport sorti le 10 janvier, Oxfam démontre que les 1% les plus riches ont utilisé leur budget carbone en 10 jours, c’est-à-dire le seuil maximal d’émission de CO2 par habitant acceptable pour ne pas dérégler le climat. Bernard Arnault l’a même épuisé en 2h15, un record.
Les 1% les plus riches émettent autant que les 99% restants en 1.500 ans. Si on prend en compte le patrimoine financier de ces milliardaires, les différences deviennent stratosphériques : leurs émissions de CO2 sont un million de fois plus élevées qu’un individu dans la moyenne. Tout simplement parce qu’ils investissent dans ce qui rapporte : les industries fossiles, le ciment, l’armement…
Et ces données s’accumulent année après année. Lorsqu’on parle des catastrophes engendrées par le réchauffement climatique, il est nécessaire de rappeler qu’il y a des responsables, et ils sont peu nombreux. Une poignée de milliardaires décide de nous envoyer dans le mur. Avec le soutien de nos gouvernants.
Le capitalisme : une impasse politique
“Depuis des années, nous luttons pour mettre fin à l’ère des combustibles fossiles et sauver des millions de vie, ainsi que notre planète. Il est plus que jamais clair que cet objectif n’est possible que si nous mettons également fin à l’ère de l’extrême richesse” expliquait le directeur général d’Oxfam International Amitabh Behar.
Les alarmes du GIEC se répètent année après année, Oxfam publie rapport après rapport depuis les années 80, accablant encore et toujours les plus aisés. Cela a-t-il déjà eu le moindre impact ? Non. La mode aujourd’hui chez les réformistes est d’appeler à « taxer les riches ». Disons-le clairement : ça ne sert à rien. Relisons Bakounine : “Y a-t-il jamais eu, à n’importe quelle époque, dans n’importe quel pays, un seul exemple d’une classe privilégiée et dominante qui ait fait des concessions librement, spontanément, et sans y être contrainte par la force ou la peur ?”
Les riches n’ont absolument aucun intérêt à accepter d’être taxés, pourquoi le feraient-ils ? Ils arriveront toujours à trouver des formes d’évitement de l’impôt, comme ils le font aujourd’hui. En outre, instaurer un ISF climatique ne ferait que leur donner un blanc seing et perpétuerait une forme d’inégalité : si vous avez les moyens de payer, vous pouvez polluer autant que vous voulez.
Pour ces gens-là, le mot d’ordre est simple : plutôt la fin du monde que la fin du capitalisme. Or le capitalisme est basé sur l’exploitation de la nature et sur une vision de l’environnement comme source de profits inépuisables. La logique d’accumulation infinie du capital ne peut s’enrayer sans un rapport de force puissant.
Sans abattre le capitalisme, point de salut.
https://contre-attaque.net/2025/01/16/plutot-la-fin-du-monde-que-la-fin-du-capitalisme/
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