Bonne nouvelle, Extrême droite
Jean-Marie Le Pen est mort ce 7 janvier 2025, à l’âge de 96 ans. On pensait que ce serait un jour de fête, mais est-ce vraiment réjouissant ?
![Jean-Marie Le Pen à la tribune pour un discours du Front National.](https://contre-attaque.net/wp-content/uploads/2025/01/472686492_1013782127458943_5041973977369632727_n.jpg)
Le vieux fasciste s’est éteint paisiblement à un âge très avancé, alors que le parti qu’il a fondé est au sommet de sa puissance, et sans jamais avoir été jugé pour ses crimes. Il est mort, mais ses idées restent bien vivantes.
D’ailleurs, tous les médias rendent déjà hommage à cet infatigable politicien d’extrême droite. Les plus modérés parlent de ses «dérapages», alors qu’il s’agissait d’une idéologie parfaitement assumée, et les plus réactionnaires décrivent sa vie comme une belle aventure qui a «marqué la Cinquième République». Revenons sur son parcours.
Né dans une famille bretonne, étudiant à Paris après-guerre, il participe dès sa jeunesse aux bagarres contre les militants de gauche et milite auprès de l’Action Française, groupuscule antisémite et pétainiste. Dans l’armée, il s’engage dans les deux grandes guerres coloniales du moment : il arrive en Indochine en 1954, comme sous-lieutenant dans un bataillon de parachutistes, puis en Algérie en 1957. Deux guerres perdues par la France, mais qui ont causé des rivières de larmes et de sang. Entre les deux, il est élu député de la liste d’extrême droite de Pierre Poujade.
En 1957, Jean-Marie Le Pen reste 3 mois en Algérie, pendant lesquels sa mission est de se «rendre au domicile de “suspects”, accompagné d’une escouade de parachutistes». Il pratique la torture et l’enlèvement d’indépendantistes algériens, ou supposés comme tels. Au domicile d’un homme arrêté, il oublie son poignard : un couteau des Jeunesses Hitlériennes retrouvé par l’enfant de la famille. Sur le fourreau de ce poignard, le propriétaire a fait graver son nom. On peut lire : «J. M. Le Pen, 1er REP». Après-guerre, il assume «Je n’ai rien à cacher. J’ai torturé parce qu’il fallait le faire». Ce sont les mots de Jean-Marie Le Pen en 1962. Par la suite, il prendra soin de nier ses actes.
En 1963, Le Pen lance avec ses amis d’extrême droite la Société d’études et de relations publiques – SERP – qui deviendra une maison de disque. Il s’agit d’abord de promouvoir la colonisation, avec quatre disques sur la guerre d’Algérie, puis en 1965, d’une série d’albums valorisant l’histoire du IIIe Reich : on y entend des discours d’Hitler et de hauts dirigeants nazis, ainsi que des chants de propagande et des ambiances de meetings. La SERP produit aussi un album sur Philippe Pétain, avec des enregistrements des discours du collabo, et la plaidoirie de son avocat après guerre, lui-même étant un copain de Le Pen.
À cette date, il est relativement inconnu. Mais il a l’idée de génie de fédérer les différentes tendances de l’extrême droite française qui se faisaient alors la guerre. Le Front National est créé le 5 octobre 1972, lors d’une réunion privée réunissant 70 personnes. Leur symbole ? Une flamme tricolore copiée sur le logo du MSI, un mouvement de nostalgiques de Mussolini en Italie. À l’époque, le FN est un obscur groupuscule composé de quelques dizaines de membres. Un parti confidentiel réunissant des néo-nazis, d’anciens collaborationnistes, des SS, des colonialistes et des criminels de guerre.
Parmi les fondateurs, Pierre Bousquet, ancien de la division SS Charlemagne, fidèle parmi les fidèles à Hitler, ou Roger Holeindre, de l’OAS, Organisation Armée Secrète, groupe terroriste qui voulait maintenir l’Algérie française, qui a tué près de 3000 personnes et tenté d’assassiner De Gaulle.
Ce micro-parti va s’imposer progressivement dans les années 1980, à mesure que les espoirs de changement portés par la gauche disparaissent, avant d’imposer toutes ses idées dans la classe politique. «L’insécurité» va devenir une obsession nationale et la police une nouvelle religion d’État.
Dans les années 1980, c’est François Mitterrand lui-même, président socialiste et ancien militant d’extrême droite, qui demande à la chaîne Antenne 2 de donner la parole à Jean-Marie Le Pen, que personne ne connaît. Son objectif est de «diviser» la droite, espérant ainsi gagner les élections. Et le pire, c’est que ça marche (au début).
En 1981, le Front National compte moins de 300 adhérents et recueille 0,18% des suffrages. En 1988, Jean-Marie Le Pen fait 14,38% des voix. En 2002, il crée la surprise en s’imposant au second tour, profitant de l’effondrement et des trahisons du Parti Socialiste. Le monstre s’est retourné contre les traitres.
En 2022, le parti arrive pour la troisième fois au second tour d’une élection présidentielle. En 2024, il dispose de dizaines de députés, et l’extrême droite monopolise les antennes de télévisions. En 2025, c’est le RN qui détient véritablement le pouvoir en France, impose ses thèmes, et gagne la bataille idéologique. Mais cela n’aura qu’un temps.
Jean-Marie Le Pen est mort paisiblement, ses victimes n’ont pas eu cette chance. Faisons en sorte que ses idées le suivent en enfer.
https://contre-attaque.net/2025/01/07/le-pen-est-mort-ses-idees-sont-toujours-la/
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