Un « nouveau » modèle social
lundi 28 novembre 2022, par Chronique du régime policier.
Cette techno-société policière s’équipe fatalement d’outils de surveillance de masse automatisés, de robots tueurs et de flics cyborgs.
Comme les machines des chaînes de production, les humains doivent être étiquetables et transparents H24.
La technopolice n’est pas une simple accumulation de machines autonomes, d’algorithmes intrusifs et de flics « augmentés », la technopolice c’est un « nouveau » modèle social, c’est la continuation du techno-monde étatiste et capitaliste avec de nouveaux outils de flicages, de contrôle, de répression et de surveillance totale.
La technopolice ce n’est pas seulement les outils des flics assermentés, mais c’est l’ensemble des dispositifs de surveillance, de coercition et de contrôle déployés dans les administrations et les entreprises.Chronique de la technopolice : robot tueur, policiers cyborgs, portrait ADN, flicage CAF et pôle emploi par algorithme, identifier des inconnus… Tank autonome pour guerre éclair à la vitesse des algorithmes
Répression numérique automatisée, flics cyborgs…
Examen de la LOPMI : Refusons les policiers programmés – Communiqué de l’Observatoire des libertés et du numérique (OLN), Paris, le 28 octobre 2022.
La loi d’orientation et de programmation du ministère de l’Intérieur (la « LOPMI ») a été adoptée au Sénat et sera débattue à l’Assemblée nationale dans les prochaines semaines. Ce texte soulève de sérieuses inquiétudes pour les sujets touchant aux libertés fondamentales dans l’environnement numérique.
L’Observatoire des libertés et du numérique appelle les député·es à rejeter massivement ce texte.
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L’avenir serait donc à l’agent « augmenté » grâce à un « exosquelette » alliant tenue « intelligente » et équipements de surveillance. Nouvelles tablettes, nouvelles caméras piéton ou embarquées, promotion de l’exploitation des données par intelligence artificielle, sont tout autant d’outils répressifs et de surveillance que le rapport prévoit d’instaurer ou d’intensifier. Le ministère rêve même de casques de « réalité augmentée » permettant d’interroger des fichiers en intervention. C’est le rêve d’un policier-robot qui serait une sorte de caméra mobile capable de traiter automatiquement un maximum d’information. Ce projet de robotisation aura pour premier effet de rendre plus difficile la communication entre les forces de l’ordre et la population.
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Voir aussi :
- Examen de la LOPMI : Refusons les policiers programmés – Communiqué de l’Observatoire des libertés et du numérique (OLN), Paris, le 28 octobre 2022.
- Le gouvernement rêve de policiers « cyborgs » – Des « agents-cyborgs », augmentés et équipés d’outils de surveillance de masse : telles sont les ambitions du gouvernement en matière de sécurité, inscrites dans un rapport annexé au projet de loi Lopmi, adopté le 22 novembre.
Des véhicules de police « augmentés », des uniformes truffés de biocapteurs et de caméras, de l’intelligence artificielle à ne plus savoir qu’en faire… Dans un épais rapport annexé à son projet de loi d’orientation et de programmation (Lopmi), adopté le 22 novembre à l’Assemblée nationale, le ministère de l’Intérieur dévoile les grandes lignes de sa « trajectoire » pour 2030. S’il n’a pas de valeur législative, ce texte donne tout de même une idée des ambitions à long terme du gouvernement en matière de sécurité : « transformer l’institution », en misant toujours davantage sur la technologie et les dispositifs de surveillance numérique. (..) La généralisation des outils de surveillance de masse défendue dans ce rapport pourrait « démultiplier le pouvoir et la potentialité de répression de la police », s’alarme la juriste. « Cela peut sembler difficile à entendre, mais ces dispositifs technologiques ne servent pas à assurer la sécurité, assure-t-elle. Les caméras de vidéosurveillance aident à résoudre moins de 2 % des enquêtes résolues. Ce ne sont pas elles qui permettent d’arrêter le trafic de drogue dans une ville. » (…)
Créer le portrait d’un individu à partir de son ADN ?
Créer le portrait d’un individu à partir de son ADN ?
>https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/les-savanturiers/les-savanturiers-du-samedi-23-juillet-2022-5036607]
La société Corsight assure qu’elle peut générer un visage à partir de l’ADN d’une personne. Ce visage pourrait ensuite être soumis à un système de reconnaissance faciale. Retrouver le visage d’un criminel à partir d’un peu de son ADN, le concept paraît vraiment incroyable !
Mais de nombreux scientifiques sont sceptiques. L’idée n’est pourtant pas nouvelle : en 2017, une société américaine a assuré avoir prédit la morphologie du visage, la voix, la couleur des yeux, de la peau, et la taille de 1000 personnes à partir de leur seul génome. Et puis, il y a des questions éthiques, si on peut vraiment identifier une personne à partir de son ADN, cela signifie que tous les génomes collectés pour la recherche sont loin d’être anonymes…
Fadettes, UFED et données de connexion : les techniques d’investigations numérique de la police
Fadettes, UFED et données de connexion : les techniques d’investigations numérique de la police
L’idée de ce texte est de répondre pratiquement aux questions de sécurité numérique qu’on se pose dans les milieux militants, de détailler au maximum les techniques d’investigation numériques (qui exploitent nos téléphoniques, nos données de navigation internet, les contenues sur nos ordinateurs et nos téléphones, …) de la police.
Ce texte a pour but de donner des arguments aux personnes qui, dans chaque groupe, répètent qu’il faut faire gaffe à la sécurité numérique, et d’en donner aux personnes qui les trouvent reloues.
On part du constat qu’il y a un manque d’informations disponibles sur les techniques d’enquêtes que les keufs utilisent pour fouiller nos téléphones et nos ordinateurs, et sur celles qui utilisent notre navigation internet et nos communications téléphoniques. Les formations à la sécurité numérique dans nos milieux sont souvent un peu trop théoriques. Elles apportent les réponses, mais ne montrent pas les problèmes.
On se concentre donc, dans ce texte, sur les techniques d’enquêtes qui touchent nos outils numériques : analyse des données de téléphonie, écoutes, analyse de la navigation internet, analyse des données enregistrées sur nos ordis ou nos téléphones, … On se base sur des techniques qu’on a vu être utilisées par les policier.es (contre nous, contre des potes, ou des pratiques qu’on a vues dans des documentaires).
On veut donner dans ce texte des pratiques de sécurité numérique qu’on voudrait voir généralisées dans nos milieux. On n’a pas vocation à se perdre dans des détails techniques, mais à détailler les techniques policières au maximum. Pour plus de détails sur les pratiques numériques pour se protéger face à la répression, il existe déjà plein de ressources, qu’on citera et qu’on vous invite à consulter !
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Festival Technopolice Marseille
1re édition du Festival Technopolice Marseille – du 22 au 24 septembre à Marseille
l y a trois ans, La Quadrature lançait l’initiative Technopolice avec le soutien d’une vingtaine d’associations. Cette initiative avait pour but de donner les outils aux habitantes et habitants des villes pour se saisir de la lutte contre la surveillance localement. Le premier groupe militant que nous avons vu naître est le collectif Technopolice Marseille, qui enchaîne conférences, expositions artistiques, cartographies de caméras et actions de rue contre les dispositifs de surveillance de la ville.
Aujourd’hui, à l’initiative du collectif Technopolice Marseille, nous sommes heureux de vous annoncer la première édition du Festival Technopolice.Chronique de la technopolice : robot tueur bientôt en service, policiers cyborgs, portrait ADN, flicage CAF et pôle emploi, identifier des inconnus… Robot armé, prêt pour le tir létal autonome
🤖 DYSTOPIE RÉELLE : LE ROBOT TUEUR
Il y a quelques années, la firme américaine Boston Dynamics lançait un « robot chien » de couleur jaune vif baptisé SPOT. L’invention, présentée comme sympathique, faisait le tour des réseaux sociaux. Le robot autonome à l’allure d’un canidé dansait en rythme sur de la musique. Il était obligatoire de trouver cette innovation « sympa » et « cool ». Les grincheux qui annonçaient une future utilisation militaire d’un tel robot étaient traités de paranoïaques et de complotistes.
À présent, le robot est équipé d’un fusil d’assaut et tire sur des cibles de façon autonome. Une vidéo probablement prise l’hiver dernier montre cette mise à jour en action. La question n’est donc pas de savoir s’il tuera des humains, mais quand, et quel pays sera le premier à envoyer ce robot tueur sur un théâtre de guerre. Une autre firme, l’entreprise américaine Ghost Robotics a déjà publié les photos d’un chien robot similaire baptisé SPUR équipé d’une arme à feu. Maintenant que le marché est ouvert, ce sera la surenchère.
Le 9 décembre 2020, les élus socialistes branchés et sympas de Nantes métropole avaient déployé le robot SPOT au cœur de Nantes, dans le cadre d’un partenariat avec une « start-up » du numérique. L’idée était de valoriser « des solutions logicielles intelligentes pour différents robots ».
À l’époque, SPOT était vanté pour « réaliser des missions d’inspection, de détection ou de collecte de données, notamment dans des environnements déstructurés, difficiles d’accès ou dangereux pour les humains » expliquaient ses concepteurs. On retrouve ainsi SPOT dans de nombreuses centrales nucléaires, inspectant les zones interdites d’accès aux humains.
Ce n’était donc pas si « cool » ni « innovant » : la première mission du robot chien était déjà la surveillance et la « reconnaissance » en terrain hostile. D’ailleurs, dès le mois de mai 2020, des modèles de cet automate patrouillait dans un parc de Singapour pour faire « respecter la distanciation sociale » dans le cadre de la pandémie. Le chien jaune diffusait un message sur les « gestes barrières » et interdisait aux humains de s’approcher, puisqu’il est doté d’une caméra capable d’évaluer le nombre de visiteurs dans le parc et la distance entre les personnes.
Le robot est donc désormais conçu et équipé pour tuer
Il est donc désormais conçu et équipé pour tuer. Et pourquoi pas tirer du gaz lacrymogène, des grenades, des balles en caoutchouc ? La dystopie est là. Est-il encore possible de stopper la course au « progrès » mortifère du capitalisme en crise ? La révolution est un « frein d’urgence » écrivait Walter Benjamin il y a quasiment un siècle.
vidéo : https://fb.watch/eq7d4hcdn6/
🤖 CHINE : FOIRE AUX DRONES ET ROBOTS TIREURS DE GRENADES
Dans le sud de la Chine, dans la ville de Shenzhen, l’Exposition internationale des drones – baptisée Shenzhen UAV Expo – et la 5e édition de l’Exposition internationale des systèmes autonomes de Chine – China UAS Expo – ont commencé le 10 août.
Le thème de cette année ? « Surpasser ses e-rêves ». Des rêves qui ressemblent à des cauchemars. Plus de 300 entreprises sont venues exposer plus de 2700 drones et systèmes autonomes.
Parmi eux, des robots policiers. Notamment un chien robot qui peut tirer des salves de grenades lacrymogènes. Après le robot équipé d’un fusil mitrailleur, les robots policiers ont de beaux jours devant eux. Bientôt dans nos rues ?
Un autre de ces automates s’adressait aux passants. Le but est qu’il puisse procéder à des contrôles d’êtres humains à l’avenir.
Parmi les centaines de modèles de drones, certains sont très avancés comme la version policière du drone de la firme JOUAV, le CW-15, un petit avion sans pilote avec un moteur hybride – électrique et essence – « conçu pour les missions de grande envergure », avec beaucoup d’autonomie, très rapide, et capable de voler à haute altitude.
Le meilleur des mondes est déjà là.
Vidéo : https://fb.watch/eQVHOQ_Ama/Chronique de la technopolice : robot tueur, policiers cyborgs, portrait ADN, flicage CAF et pôle emploi par algorithme, identifier des inconnus… Flash-ball sous IA pour tirer sur les individus suspects
DES FLASHBALLS « INTELLIGENTS » EN ISRAËL
L’armée israélienne parle d’un dispositif de « visée intelligente ». C’est un système qui vient d’être installé à Hébron, ville palestinienne de Cisjordanie, sur un site qui a été le théâtre de manifestations et d’affrontements entre Palestiniens et soldats israéliens.
Ce Flash-Ball 2.0 est assistée par une intelligence artificielle, et développé par une société baptisée Smart Shooter. Le viseur « Smash » est prévu pour équiper les systèmes de dispersion de foules des points de contrôle d’Hébron. Les checkpoints qui bloquent et humilient les populations opprimées ne suffisent pas, il faut en plus une arme robotique qui leur tire dessus.
Même les romans dystopiques n’ont pas anticipé le tir automatisé en cas de mouvement « suspect »
C’est le quotidien israélien Haaretz qui explique le dispositif et diffuse une photo de l’arme, qui est encore en phase de test. L’intelligence Artificielle qui guide les tirs vise « à détecter les mouvement de foule et tirer très précisément sur les individus considérés comme les plus à risque ». Même les romans dystopiques n’ont pas anticipé le tir automatisé en cas de mouvement « suspect ». Le quotidien précise que « les projectiles utilisés pendant la phase de tests ne seront pas létaux ». Nous voilà rassurés. À terme l’arme sera équipée de grenades assourdissantes ou lacrymogènes.
Les organisations de protection des droits humains s’inquiètent que ces Flash-Balls soient couplés aux caméras de reconnaissance faciale déjà installées sur des barrages routiers à Hébron. La technologie permettrait de tirer automatiquement sur une personne fichée par les autorités. Haaretz rappelle que Tsahal utilise déjà des drones capables de viser un individu détecté par une intelligence artificielle et de tirer à distance.
Les drones autonomes existent déjà. En Lybie et en Iran, des exécutions automatiques, sans l’intervention de l’homme, ont été commises ces derniers mois par des drones autonomes. La reconnaissance faciale se généralise dans le monde et les bases de donnée biométriques fichent déjà des milliards d’êtres humains dans le monde. Tout est déjà prêt.
Le viseur Smash utilisé par l’État Israélien équipe des armes utilisées par des militaires ou les Marines américains. Ils permettent des tirs assistés extrêmement précis, même un mauvais tireur devient un sniper, y compris dans des situations de fatigue, de stress intense ou de mauvaise visibilité. Le système verrouille la cible à distance et la munition atteint sa cible. Comme les systèmes de tir des avions de chasse.
Les armées du monde entier travaillent sur des blindés autonomes, des soldats « augmentés » par la technologie et des système de tirs automatisés. Des chiens robots équipés de mitrailleuses ou de lance-grenades sont déjà sortis des usines. Le test israélien préfigure une généralisation de ce type d’arsenal.
Et en France ? La police est massivement équipée de LBD qu’elle utilise abondamment. Et le gouvernement est en passe de généraliser la reconnaissance faciale : un rapport du Sénat réclamait en mai dernier une loi sur la reconnaissance faciale dans l’espace public. Un texte signé par le Parti Socialiste, Les Républicains et le Centre, qui préconise la généralisation de la reconnaissance faciale avant les Jeux Olympiques de Paris en 2024. Un événement qui s’annonce comme une immense démonstration de force sécuritaire du gouvernement français. Avec des Flash-Balls 2.0 ?
(posts de Contre Attaque)
DIVERS
- Prédire les flux migratoires grâce à l’intelligence artificielle, le pari risqué de l’Union européenne – Depuis plusieurs mois, l’Europe développe une intelligence artificielle censée prédire les flux migratoires afin d’améliorer l’accueil des migrants sur son sol. Or, selon plusieurs documents obtenus par Disclose, l’outil baptisé Itflows pourrait vite se transformer en une arme redoutable pour contrôler et harceler les personnes cherchant refuge en Europe.
- L’Union européenne a discrètement fourni au Maroc de puissants systèmes de piratage des téléphones – Pour renforcer le contrôle des migrants, l’Union européenne a fourni à la police marocaine des logiciels d’extraction de données des téléphones. Faute de contrôle, ces technologies pourraient servir à accentuer la surveillance des journalistes et défenseurs des droits humains au Maroc.
- Facebook a fourni les échanges privés d’une mère et sa fille accusée d’avortement illégal – Celeste Burgess et sa mère Jessica sont accusées d’avortement illégal. Au coeur de l’enquête, des échanges privés que Facebook a fourni à la police.
- Je trouve l’identité d’inconnus dans la rue avec l’IA
- Financement régional de drones policiers : l’Île-de-France dans l’embarras – En début d’année, La Quadrature du Net s’associait aux élu·es de la région Île-de-France mobilisé·es contre le subventionnement illégal de drones municipaux par la région. Mise sous pression, la majorité régionale, embarrassée, commence à admettre l’illégalité de cette subvention, mais tente de gagner du temps. (…) Le financement des drones que nous avons attaqué n’est qu’un minuscule bout de cette technopolice francilienne : armes létales, vidéosurveillance dans les lycées ou encore centre de supervision XXL des caméras de vidéosurveillance. (…)
- Ce n’est pas très malin d’être intelligent – Alors que nous nous approchons des limites de nos ressources en énergie, en alimentation et en eau en raison du sous-investissement, de la course au profit et de la planification à court terme, le concept de technologie intelligente est de plus en plus vendu au public comme une réponse à ces problèmes. Un texte de la campagne Don’t Pay UK revient sur la politique des compteur intelligents et la logique de surveillance visant à nous soutirer des données qui lui est inhérante.
- Marseille : deuxième ville la plus surveillée de France – Marseille avec ses 1558 caméras, ses 4 data center et bientôt l’arrivée de drones policiers dans l’espace public, autorisés par le conseil Constitutionnel depuis février 2022, devient la 2e ville la plus surveillée de France.
- Ce que j’ôte de mes nuits – #Mois anti-surveillance – Cette histoire pourrait commencer comme un conte de fées pour riches : dans la petite bourgade de Mandelieu-la-Napoule située en périphérie de Cannes, la mairie a pris début juillet l’initiative d’installer douze brumisateurs en plein centre-ville. (…) l’entreprise de métallurgie et de mécatronique vante la miniaturisation de ses caméras urbaines dont l’efficacité augmente « parce que les gens ne se savent pas filmés » (…)
CAF : le numérique au service de l’exclusion et du harcèlement des plus précaires
CAF : le numérique au service de l’exclusion et du harcèlement des plus précaires – Depuis bientôt un an nous luttons au sein du collectif « Stop Contrôles »1afin de s’opposer aux effets de la dématérialisation et de l’utilisation du numérique par les administrations à des fins de contrôle social. Après avoir abordé la situation à Pôle Emploi, nous nous intéressons ici au cas des Caisses d’Allocations Familiales (CAF). Nous reviendrons bientôt sur les suites de cette lutte dans laquelle nous souhaitons pleinement nous engager dans les prochains mois.
« Entre la CAF et vous, il n’y a qu’un clic ». Voilà ce que l’on pouvait lire sur une affiche de la CAF en ce début d’année. Et le sous-titre laisse rêveur : « Accédez à tous les services de la CAF 24h/24 ». Vaine promesse d’un numérique facilitant l’accès aux prestations sociales, et ce, à toute heure du jour et de la nuit. Sinistre slogan masquant la réalité d’une informatisation à outrance, vecteur d’une exclusion sociale calculée.
Alors que la généralisation des démarches en ligne s’accompagne avant tout d’une réduction des capacités d’accueil physique, mode de contact pourtant essentiel pour les personnes en situation de précarité, c’est à un algorithme que la CAF laisse le soin de prédire quel·les allocataires seraient « (in)dignes » de confiance et doivent être contrôlé·es. Chargé de donner une note à chaque allocataire, censé représenter le « risque » qu’iel bénéficie indûment d’aides sociales, cet algorithme de scoring sert une politique de harcèlement institutionnel des plus précaires.
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Mais le numérique a aussi modifié en profondeur le contrôle lui-même, désormais tourné vers l’analyse des données personnelles des allocataires, dont le droit d’accès donné aux contrôleurs·ses est devenu tentaculaire. Accès aux comptes bancaires, données détenues par les fournisseurs d’énergie, les opérateurs de téléphone, les employeurs·ses, les commerçant·e·s et bien sûr les autres institutions (Pôle emploi, les impôts, les caisses nationales de la sécurité sociale…)24 : le contrôle s’est transformé en une véritable mise à nu numérique.
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Refuser de se soumettre à cette transparence est interdit sous peine de suspension des allocations. Le « droit au silence numérique » n’existe pas : l’opposition à une transparence totale est assimilée à de l’obstruction. Et pour les plus réticent·es, la CAF se réserve le droit demander ces informations directement auprès des tiers qui les détiennent.
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C’est à l’allocataire qu’il appartient de répondre du jugement algorithmique
La note attribuée par l’algorithme agit tout particulièrement comme une preuve de culpabilité. Contrairement à ce que veut faire croire la CAF, qui rappelle à qui veut l’entendre que l’algorithme n’est qu’un « outil d’aide à la décision », un score de risque dégradé génère suspicion et sévérité lors des contrôles. C’est à l’allocataire qu’il appartient de répondre du jugement algorithmique. De prouver que l’algorithme a tort. Cette influence de la notation algorithmique sur les équipes de contrôle, fait reconnu et désigné sous le nom de « biais d’automatisation », est ici encore mieux expliquée par un contrôleur : « Compte-tenu du fait qu’on va contrôler une situation fortement scorée, certains me disaient que, bon voilà, y a une sorte de – même inconsciemment – non pas d’obligation de résultats mais de se dire : si je suis là, c’est qu’il y a quelque chose donc il faut que je trouve ».
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La pratique du scoring que nous dénonçons à la CAF n’est d’ailleurs pas spécifique à cette institution. Pionnière, la CAF a été la première administration sociale à mettre en place un tel algorithme, elle est désormais devenue le « bon élève », pour reprendre les dires d’une députée LREM, dont doivent s’inspirer les autres administrations. Aujourd’hui ce sont ainsi Pôle emploi, l’assurance maladie, l’assurance vieillesse ou encore les impôts qui, sous l’impulsion de la Cour des comptes et de la Délégation nationale à la lutte contre la fraude, travaillent à développer leurs propres algorithmes de notation.
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Pôle Emploi : flicage via données bancaires, téléphoniques et des fournisseurs d’énergies
- Pôle Emploi resserre ses mailles technologiques – Pour mieux traquer ses usager.es et débusquer les moindres traces de fraude, Pôle Emploi a désormais accès aux données des fournisseurs d’énergie et de téléphonie mobile. Heureux bénéficiaires d’un compteur électrique dit « communicant » (de type Linky) branché à domicile ! Heureux possesseurs d’un traceur permanent en poche, plus connu sous le nom de téléphone portable ! Vous saviez déjà que ces dispositifs technologiques permettent aux autorités trop curieuses d’estimer, pour l’un, à quelles heures un logement est occupé (ou pas) et s’il héberge par exemple des hôtes supplémentaires. Pendant que l’autre leur offre gratos chaque déplacement par géolocalisation, en plus d’espionner les conversations de son détenteur. Mais pourquoi réserver le privilège du contrôle social aux seuls flics en uniforme, alors qu’un paquet d’autres larbins se pressent régulièrement au portillon pour en resserrer les mailles ? (…) les flics du travail vont désormais pouvoir se faire communiquer sous trente jours, à la demande et à titre gratuit, toutes « informations nécessaires au contrôle de la sincérité et de l’exactitude des déclarations souscrites, ainsi que de l’authenticité des pièces produites » par les allocataires… directement auprès des banques, mais également « des fournisseurs d’énergie et des opérateurs de téléphonie ». (…)
Bientôt chez nous ? – « on n’arrête pas le progrès ni l’innovation »
Stylo espion avec caméra intégrée… Puces de traçage dans leur vêtements… Contrôle de reconnaissance toutes les 30 secondes pour scanner leurs émotions… L’actualité des écoles chinoises… La science fiction est dépassée 🤯
« Où qu’ils soient, dès que les élèves posent leur stylo sur une feuille de papier, le contenu est transmis par Bluetooth en temps réel à l’ordinateur de l’enseignant », explique Xiandai Kuaibao, le journal de Nankin. Les professeurs connaissent ainsi précisément le temps consacré par leurs élèves au travail scolaire, peuvent télécharger leurs devoirs et les corriger. »
Puce GPS et reconnaissance faciale
Les systèmes de surveillance basés sur l’utilisation de l’intelligence artificielle ont pénétré depuis longtemps l’enceinte des établissements scolaires chinois. La reconnaissance faciale est ainsi largement déployée au portail des écoles. Des caméras voire des casques permettant de mesurer l’activité cérébrale sont utilisés dans certaines classes pour s’assurer de l’attention portée par les enfants à leur enseignant.
La source : En Chine, les écoliers espionnés par des stylos connectés – L’emprise délirante du régime chinois sur sa population franchit un nouveau palier, avec la fourniture généralisée de stylos connectés aux écoliers. Objectif : surveiller leur prise de notes et leurs devoirsChronique de la technopolice : robot tueur bientôt en service, policiers cyborgs, portrait ADN, flicage CAF et pôle emploi, identifier des inconnus… Augmentation de la répression et du fichage permanent
Chacun doit être rigoureusement connu et surveillé discrètement
« Ce qui a changé, c’est l’application de la technologie à tous les domaines de la vie.
Sur le terrain policier, c’est les systèmes rationalisés, les hiérarchies unifiées, les fichiers et rapports réguliers. Il y a dès Napoléon cette tendance à la mécanisation.
La techno-science semble la traduction du souci humain de maîtriser les choses par la raison : rendre comptable ce qui est subconscient, quantitatif ce qui est qualitatif, porter la main sur la nature et y mettre de l’ordre.
Les technologies policières ont pour fin nécessaire la transformation de la nation tout entière en camp de concentration. Pour être certain d’attraper des criminels, il faut que chacun soit surveillé, que l’on sache exactement ce que fait chaque citoyen, ses relations, ses habitudes, ses distractions…
Chaque habitant sera suivi dans toutes les étapes de sa vie, géographiquement, biologiquement, économiquement
Cela ne veut pas dire que la terreur règne ou que l’on est arrêté arbitrairement. Cela veut dire que chacun doit être rigoureusement connu et surveillé discrètement.
La création des « feuilles de mise en observation » permet de savoir si un service de police s’intéressait à un individu alors qu’il n’existait contre lui aucune procédure. Tout homme qui a une fois dans sa vie affaire à la police est donc mis en observation. Il est évident que cela n’est qu’un point de départ, car il sera trop tentant, et nécessaire, de compléter ces feuilles de toutes les observations que l’on aura pu recueillir.
La techno-police suppose donc le camp de concentration, non point sous son aspect dramatique, mais administratif. L’usage nazi fausse les définitions : le camp est basé sur deux idées qui dérivent directement de la conception technologique de la police — détention préventive et rééducation.
Chaque habitant sera suivi dans toutes les étapes de sa vie, géographiquement, biologiquement, économiquement, et la police saura avec exactitude tout ce qui est nécessaire pour contrôler chacun. Elle n’a plus besoin d’être brutale et inquisitoriale, elle ne se fait plus sentir, mais elle colle à chaque instant de la vie de chacun, de manière invisible et insaisissable. »
💣 Jacques Ellul (La Technologie, enjeu du siècle)
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