Justice climatique
par Malika Barbot 19 février 2021
Le 3 octobre 2020, sept personnes entrent sur le tarmac de l’aéroport de Bordeaux-Mérignac pour stopper le trafic aérien afin d’alerter sur l’urgence climatique. Poursuivis en justice, ils risquent cinq ans de prison et 18 000 euros d’amende. Leur procès se tient ce lundi 22 février.
« Pour la majorité d’entre nous, c’est notre premier procès, mais on se dit qu’on a eu raison de faire ça. Nous avons moins peur de l’issue du procès que du changement climatique », explique Gaëtan. Il est l’un des sept prévenus poursuivis pour avoir occupé l’aéroport de Bordeaux-Mérignac le 3 octobre dernier. Lors de la journée nationale contre les aéroports, plusieurs actions avaient alors été menées en France. À Bordeaux, une marche était organisée par deux organisations, ANV-COP 21 Gironde et Extinction Rébellion. Alors que les activistes arrivent près de l’aéroport de Bordeaux-Mérignac, sept d’entre eux passent par dessus une grille avec deux échelles et rentrent sur le tarmac. « Nous sommes arrivés au bout d’une piste, nous avons déroulé notre banderole et craqué des fumigènes », raconte Gaëtan. S’en suivent six heures de garde à vue et la saisie de la justice. Tous les sept sont convoqués au tribunal ce lundi 22 février.
Ces actions dans les aéroports visaient à dénoncer l’inaction du gouvernement face au changement climatique et à mettre l’industrie de l’aérien face à ses contradictions. « Des efforts fiscaux ont été demandés sur l’essence alors que le kérosène des avions n’est toujours pas taxé, dénonce Gaëtan. Il y a urgence, il faut faire faire un virage à 180° à ce secteur industriel qui vise toujours à l’augmentation de son trafic. »
« Porter un message politique au cœur d’un lieu problématique »
Face à l’impact climatique de l’aviation, les sept prévenus invoquent le non respect par l’État de ses engagements dans le secteur aérien et « le mythe de l’avion vert ». « Aucune technologie ne permet de croire que le kérosène peut être écologique. » Ils pointent aussi du doigt l’aspect inégalitaire du secteur : celles et ceux qui recourent le moins à l’avion, dans les pays du Sud à faible revenu, sont les plus impactés par le changement climatique.
Les militants poursuivis mettent en avant la dimension politique de leur action et assument leur choix d’agir. « Nous n’avons pas un entrainement intensif pour entrer sur une piste d’avion, nous sommes juste armés de nos convictions » plaisante Gaëtan. Pour lui « la situation actuelle exige un esprit civique qui passe par la désobéissance civile ». Lorsqu’il marchait sur le tarmac, ce samedi d’octobre, il se doutait bien qu’une telle action déboucherait sur des arrestations et probablement un procès, mais c’était un moyen de questionner de manière visible le secteur aérien, l’État et la société. Le militant poursuit : « Nous voulions montrer que ce secteur est condamné, incohérent et injuste. » Pour Éric, membre de ANV-COP 21 et l’un des organisateurs de la marche sur l’aéroport de Bordeaux : « Les mots ne suffisent plus. Quand l’action est légitime, passer par l’illégalité peut être nécessaire, même si on est dans un climat de répression généralisé délétère et vraiment menaçant. »
Malika Barbot
Photo de Une : Le 3 octobre sur le tarmac. © ANV-COP 21 et Extinction Rébellion
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